Emily in Paris est de retour. Diffusée dès le 22 décembre sur Netflix, la série imaginée par Darren Star débarque pour une saison 2 et la fin d'un suspense pas vraiment insoutenable. On aurait pu se passer d'une suite, mais puisque le géant du streaming insiste, on s'y plonge. "C'est Noël après tout, notre cerveau a bien besoin d'une pause", pense-t-on en amont du visionnage, encore vierge de ces 10 épisodes ressentis 100.
D'abord, un rappel. Dans les dernières minutes du chapitre 1, on nous laissait avec ces dilemmes irrésolus : la presque seule amie d'Emily (Lily Collins) a-t-elle découvert qu'elle se tapait son mec ? Va-t-elle être en colère ou balayer la trahison d'une coupe de Champere, le champagne familial volontairement dégueu ?
La responsable marketing la plus pénible des Etats-Unis rencontrera-t-elle l'amour autre part que dans son immeuble, auprès d'un chef (Lucas Bravo) qui ne lave pas ses poêles ? Découvrira-t-elle, l'espoir fait vivre, l'existence des arrondissements à deux chiffres dans la capitale ?
Et surtout, surtout : supportera-t-on une nouvelle fois, et jusqu'au bout, cette création au mieux gênante, au pire offensante ? Réponse (et spoilers).
Comme en 2020, ça démarre avec deux épisodes qui nous sortent par les yeux et 8 moins irritants mais pas plus passionnants.
Emily s'empêtre toujours plus dans ce triangle amoureux qui ne prend pas de l'autre côté de l'écran. Mindy (Ashley Park) se lance dans une carrière musicale de rue qui n'apporte pas grand-chose à l'histoire. Julien (Samuel Arnold) et Luc (Bruno Gouery) restent en retrait. Camille (Camille Razat) persiste à s'enticher de celle qu'elle sait être sa rivale pour une raison (l'amitié ? La vengeance ?) qui nous échappe. On ne voit toujours pas la Ville lumière telle qu'elle est vraiment.
Pourtant, il y avait des annonces de changement. Les auteurs et autrices avaient assuré que la série serait plus "inclusive" pour coller à la réalité parisienne, entre autres. Sauf que si l'on remarque bien de nouveaux acteurs au casting qui ne correspondent pas trait pour trait au fantasme archaïque d'une ville blanche, bourgeoise et "chic", l'un est londonien (Lucien Laviscount) et l'autre américain (Jeremy O. Harris). Rien à voir avec la mixité culturelle que le show continue d'écarter de sa vision carte postale, donc.
Si on creuse un peu côté bons points, on pourrait reconnaître qu'Emily est dans une démarche un tantinet moins arrogante aujourd'hui : elle fait l'effort de prendre des cours de français. Et puis aussi, que la main est légèrement moins lourde sur les clichés que l'année dernière - à part le traditionnel "les Français·e·s ne foutent rien au boulot, la preuve, il est illégal de passer un appel pro le week-end", servi à outrance. Ou bien on s'y est habitué·e.
Mais à part ça...
Reste Sylvie Grateau (Philippine Leroy-Beaulieu) qui relève, côté justesse du jeu et capital sympathie peut-être inattendu, un peu le niveau.
C'est la "méchante" du scénario. Hautaine, vêtue de couleurs sombres, toujours une cigarette prête à être allumée à la main : la Cruella frenchie au brushing impeccable. Dans ce deuxième chapitre, Sylvie Grateau gagne notre affection grâce à l'exploration de plusieurs de ses relations et quelques tabous âgistes déboutés.
Elle ne joue plus, comme jadis, l'agente double du patriarcat, et notre attachement pour elle atteint même son paroxysme lorsqu'elle est confrontée à la boss d'Emily, Madeline (Kate Walsh), encore plus imbuvable que la première.
Dommage que le scénario ne tourne pas davantage autour d'elle, et se concentre sur des axes qui ne captivent pas leur audience, au bas mot.
L'intrigue professionnelle pour ne citer qu'elle, pensée pour maintenir en haleine et clairement inspirée de Dix pour cent. Ou l'escapade à Saint-Tropez en train de nuit qui, non contente de tomber comme un cheveux sur la soupe, fera aussi croire à des millions de spectateurs et spectatrices non initié·e·s que le trajet Paris-Villefranche-sur-Mer se déroule dans des conditions similaires à celles de L'Orient-Express. Alors qu'en fait, pour l'avoir testé, c'est à peine si les draps des couchettes sont changés. Ahlala... (à ne pas confondre avec "oh la la", Emily !) quel raté !
Quand on fait le bilan, Emily in Paris n'est pas le genre de plat qui a plus de goût quand on le ressert le lendemain - ou quelques mois plus tard. Non, en fait, le show nous fait plutôt penser à un dimanche soir sans fromage râpé pour aller avec ses coquillettes : d'abord exaspérant, puis très fade et finalement, un peu déprimant.
Emily in Paris, saison 2 disponible sur Netflix le 22 décembre 2021