Culture
Haifaa al Mansour, pionnière de la réalisation dans un pays sans cinéma
Publié le 5 février 2013 à 15:51
Par Laure Gamaury
Première femme à réaliser un film en Arabie Saoudite, Haifaa al Mansour fait actuellement la promotion de « Wadjda ». Lors de son passage en France, elle a évoqué cette histoire d'une fillette qui voulait un vélo, une activité interdite pour les filles en raison des traditions. Entretien avec une réalisatrice qui se bat avec ses propres armes pour faire évoluer les droits des femmes et moderniser les consciences.
Haifaa al Mansour, pionnière de la réalisation dans un pays sans cinéma Haifaa al Mansour, pionnière de la réalisation dans un pays sans cinéma© Abaca
La suite après la publicité
Terrafemina : Pourquoi avoir choisi pour fil rouge ce vélo qui nous semble une pratique anodine ? Est-ce un droit qui fait débat en Arabie Saoudite ?

H. al M. : Il y avait deux points de départ à mon film : je voulais raconter l'histoire d'une fille ayant grandi dans un univers proche du mien, issu d'un milieu traditionnel, une culture que je connais bien. Le second point était ce vélo, qui représente le mouvement, le changement. Mais il me restait à écrire l'histoire qui lierait ces deux « concepts ». Mais ce n'est pas une question plus centrale que cela en Arabie Saoudite.

Tf : Destiniez-vous « Wadjda » plutôt à un public étranger ou aux Saoudiens ?

H. al M. : Mon film est destiné à tous, Saoudiens et étrangers. J'espère que le maximum de personnes dans et en dehors de mon pays pourront voir ce film. Beaucoup de Saoudiens ont entendu parler de « Wadjda » suite à sa présentation à Venise et étaient très fiers d'avoir un produit local qui les représentait à l'étranger. Beaucoup se sont déplacés pour le voir lors de sa première présentation au Moyen Orient, au festival de Dubaï. Et ils ont apprécié de se voir représenter dans la vie de tous les jours, de reconnaître leur ville, leur environnement. Certains sont venus me voir à l'issue de la projection en me disant « c'est génial, vous avez pu filmer le bus de l'école… Vous avez filmé telle ou telle rue ».

Quand aux spectateurs étrangers, c'est important pour moi de montrer le plus sincèrement possible ma culture, mon pays. On peut voir des images liées à l'actualité de l'Arabie Saoudite dans les journaux TV, mais jamais le quotidien des Saoudiens.

Tf : Comment assumez-vous ce rôle de pionnière auprès des Saoudiens ?

H. al M. : Je ne sais pas si je suis une pionnière. Beaucoup de femmes, mais également des hommes qui les soutiennent, agissent pour le progrès dans le pays : des sportives saoudiennes étaient présentes aux derniers Jeux Olympiques. Tout récemment, trente femmes ont été élues au Parlement du pays. Le gouvernement distribue des bourses scolaires qui permettent aux étudiants, hommes et femmes, d'aller étudier à l'étranger. C'est la preuve que l'Arabie saoudite s'ouvre peu à peu. Le changement se fait doucement mais il s'opère tout de même. Et j'espère que mon film donnera envie à des jeunes filles et des jeunes garçons de réaliser leur rêve. Il n'y a pas de salle de cinéma en Arabie saoudite, mais le film sera diffusé très prochainement à la télévision et en DVD.

Tf : Allez-vous continuer à réaliser des longs-métrages ?

H. al M. : Oui, mais je n'ai pas encore d'histoire en tête pour mon prochain film. Ce qui est certain, c'est que je veux continuer à travailler avec Razor Film, mon producteur allemand, et les studios Rotana en Arabie saoudite. Il y a encore beaucoup d'histoires à raconter sur mon pays.

Mots clés
Culture cinéma droits des femmes sortie
Sur le même thème
"Brûlée à 75 %" : une athlète des JO 2024 victime d'une tentative de féminicide, dans un pays où cette réalité est un tabou play_circle
Société
"Brûlée à 75 %" : une athlète des JO 2024 victime d'une tentative de féminicide, dans un pays où cette réalité est un tabou
4 septembre 2024
Et si ce portrait de femmes primé à Cannes était le nouveau chef d'oeuvre contestataire du cinéma iranien ? play_circle
Culture
Et si ce portrait de femmes primé à Cannes était le nouveau chef d'oeuvre contestataire du cinéma iranien ?
26 août 2024
Les articles similaires
"Changer de corps, c'est changer le monde" : avec l'ovni "Emilia Perez", Jacques Audiard entremêle les genres avec flamboyance play_circle
Culture
"Changer de corps, c'est changer le monde" : avec l'ovni "Emilia Perez", Jacques Audiard entremêle les genres avec flamboyance
20 août 2024
En ce moment au cinéma : “Les belles créatures”, une claque de cinéma social (et viscéral) tout droit venue d’Islande play_circle
Culture
En ce moment au cinéma : “Les belles créatures”, une claque de cinéma social (et viscéral) tout droit venue d’Islande
25 septembre 2024
Dernières actualités
« Quelle déception” : ce chanteur culte de notre adolescence sera à l'inauguration de Donald Trump, les fans sous le choc play_circle
musique
« Quelle déception” : ce chanteur culte de notre adolescence sera à l'inauguration de Donald Trump, les fans sous le choc
17 janvier 2025
"Quand tu es triste mais que tu te rappelles que maintenant tu mets du S" : cette star de la télé dévoile sa perte de poids et crée la polémique play_circle
people
"Quand tu es triste mais que tu te rappelles que maintenant tu mets du S" : cette star de la télé dévoile sa perte de poids et crée la polémique
17 janvier 2025
Dernières news