"Les tumblr girls de 2019. Vous les trouverez probablement en train de porter un chouchou, un haut tube, un ras du cou en coquillage, des Vans blanches ou des Birkenstocks et n'oubliez pas la gourde Hydro Flask pour finir le look", nous explique Urban Dictionnary quand on décide d'en savoir plus sur le nouveau phénomène des réseaux sociaux : les VSCO Girls. On avait entendu parler de VSCO il y a un moment, comme d'une application de partage de photos, essentiellement utilisée pour ses filtres façon retour de plage et coucher de soleil en Californie. Et puis le terme nous était sorti de l'esprit au même titre que Tik Tok, autre outil largement emprunté par cette tranche de la Génération Z pour... se filmer en train de bouger les lèvres sur Despacito. Chic passe-temps.
Sauf qu'à force de traîner frénétiquement sur Instagram à la recherche d'un énième tapis berbère et d'une robe à fleurs façon fermière (on appartient clairement à un autre cliché), on a fini par repérer le terme au fil de mèmes plus ou moins compréhensibles à notre niveau. En creusant un peu, on a découvert qu'il était même source de fascination et de reproduction chez une tranche de cette population, et de parodie chez le reste. C'en était assez pour déclencher notre envie d'en savoir plus. Mais qui sont réellement ces VSCO Girls qui animent autant Internet ?
Les VSCO Girls tirent donc bel et bien leur nom de VSCO. En réalité, elles ont fait du filtre mi-chaleur, mi-nostalgie emblématique de l'appli, l'inspiration principale de leur quotidien. Et puise de cette ambiance "beachy" un look ultra-identifiable. Au-delà des accessoires cités plus haut, on leur associe aussi des t-shirts larges tie & dye ou griffés de marques de sport sur le retour - qu'on n'aurait jamais osé porter en notre temps, même en cours d'EPS session hand. Les temps changent, c'est certain, et ce n'est pas Fila qui dira le contraire.
Autres signes distinctifs des VSCO Girls, une description flagrante que pointent Refinery29 et BuzzFeed News à travers quelques interviews au coeur de la cible : le fait qu'elles soient quasiment toutes blondes, blanches, minces et riches.
"Normalement, quand on parle d'une VSCO girl, ce sont surtout des personnes qui sont blanches et très minces et possèdent toutes ces grandes marques", indique ainsi Caiti DeCort, 15 ans et Youtubeuse. "C'est typiquement associé au fait d'être riche", précise-t-elle.
C'est vrai qu'à faire défiler quelques profils homologués et sites de produits qui déterminent leur style, on se rend vite compte qu'une ado "banale" - soit dénuée d'un montant d'argent de poche excédent un SMIC - aurait du mal à adopter le mode de vie (le sac à dos Fjällräven Kånken coûte la bagatelle de 79,90 €). Et comment faire pour poster des photos façon surfeuse SoCal (Californie du Sud, pour les non-initié.es) quand on vit à Clermont-Ferrand ? Assez exclusif, comme concept. Mais apparemment aussi centré sur la nature.
Ou plutôt, les tortues. Comme un cri de ralliement à leur meute, les jeunes filles qui se taguent et se définissent comme VSCO Girls (on compte 1,2 millions d'occurrences sur Instagram), scandent des "Save the turtle !" sous leurs photos léchées, prêchant la bonne parole écolo une gourde de la marque Hydro Flask à la main et des pailles en métal dans l'autre. Une prise de conscience questionnable, quand on voit le nombre d'autocollants, de bracelets et de chouchous qu'elles collectionnent, mais il faut croire que l'esthétique prime sur l'action écologique.
Dans un article signé NBS qui décrypte le phénomène, une jeune fille de 18 ans nommée Caprese Wippich - autoproclamée "VSCO girl à la retraite", explique d'ailleurs que "C'est un aspect très intéressant de l'esthétique 'VSCO girl'. Il y a une petite partie environnementale et c'est amusant. Les filles qui n'étaient pas intéressées par la protection de l'environnement auparavant sont maintenant toutes contrariées parce que cela fait désormais partie de leur style". Si la tendance peut éloigner de la consommation de bouteilles en plastique, pourquoi pas.
En fin de compte, les VSCO girls n'ont rien de bien différent des multiples modes d'ados que les époques ont connus. A la seule différence de leur rayonnement planétaire grâce à une maîtrise impressionnante des réseaux sociaux. Quoiqu'il en soit, on espère juste que l'engagement environnemental qu'elles revendiquent à coup de hashtags, ne fane pas aussi rapidement qu'une story en bord de mer.