C'est ce samedi que sera célébré le quarantième anniversaire de la loi Veil. Promulguée le 17 janvier 1975 à l'issue de semaines de débats houleux à l'Assemblée nationale, elle dépénalise le recours à l'avortement, jusqu'ici considéré comme un crime.
Alors que l'Institut national des études démographiques (INED) vient de publier une étude sur l'évolution des comportements relatifs à l'avortement en France, la ministre des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine a annoncé la mise en place d'un plan national d'actions pour « réaffirmer ce droit à l'IVG en le rendant plus accessible ».
Accompagnée de la Secrétaire d'État aux droits des femmes Pascale Boistard, la ministre s'est rendue ce matin au centre de planification familiale du centre hospitalier de Saint-Denis, où elle a annoncé qu'un certain nombre de mesures seraient mises en place d'ici l'automne 2015. « La loi Veil est une loi de progrès, un cadre accepté par l'écrasante majorité des Français. Il s'agit désormais de s'assurer que ce droit peut être exercé simplement. C'est le cas dans l'écrasante majorité des cas. Mais des difficultés peuvent apparaître dans l'accès à une information objective. Il peut aussi y avoir des différences de prise en charge sur le territoire, et des enjeux financiers », a déclaré Marisol Touraine.
Pour faciliter l'accès des femmes à l'IVG, la ministre a ainsi annoncé une amélioration de sa prise en charge financière. « Depuis mars 2013, l'IVG est prise en charge à 100%. Désormais, ce sera également le cas pour l'ensemble des actes d'accompagnement nécessaires : examens biologiques pré-IVG, échographie de datation… », a déclaré Marisol Touraine. Cette mesure sera appliquée en septembre après un décret en Conseil d'État.
Alors que la Haute Autorité de Santé (HAS) dénonçait la pratique trop systématique des IVG médicamenteuses au détriment des interventions chirurgicales, les femmes auront aussi à présent le choix de leur traitement. En 2012, six IVG sur dix sont réalisées de façon médicamenteuse et ce, jusqu'à 14 semaines d'aménorrhée, selon la Drees. Or, la Haute Autorité de Santé estime qu'au-delà de sept semaines de grossesse, l'IVG médicamenteuse multiplie les risques de complication.
Parce que de nombreuses femmes souhaitant mettre fin à une grossesse non-désirée manquent encore aujourd'hui cruellement d'informations sur la procédure de l'IVG et que de fausses plate-formes tenues par des militants anti-avortement existent, Marisol Touraine a ainsi annoncé la mise en place d'un numéro vert unique et anonyme. Géré par le planning familial, il sera opérationnel en septembre, et complémentaire du site Internet ivg.gouv.fr lancé en janvier 2014. Les femmes pourront y poser toutes leurs questions liées à la sexualité, à la contraception et au droit à l'avortement.
Malgré ces avancées significatives du droit à l'avortement depuis quarante ans, mettre sereinement un terme à une grossesse non-désirée reste compliqué dans de nombreuses régions de France. Selon un rapport du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes sur l'accès à l'IVG, 130 centres pratiquant l'interruption volontaire de grossesse ont, « pour des questions de rentabilité financière », fermé leurs portes en l'espace de dix ans. Pour éviter la fermeture de nouveaux centres, et pour faciliter l'accès des femmes à l'IVG, les agences régionales de santé (ARS) devront élaborer un « plan régional pour l'accès à l'avortement ». Désormais, les médecins exerçant dans les centres de santé suffisamment équipés pourront pratiquer des IVG chirurgicales tandis que les sages-femmes sont autorisées à réaliser des IVG médicamenteuses. Ces nouvelles mesures seront examinées au printemps dans le cadre de la future loi de santé.
Pourtant, rappelle Le Monde, toutes les demandes n'ont pas été satisfaites. Comme celle du Haut Conseil à l'égalité qui souhaitait la suppression du délai de réflexion de sept jours entre les deux premiers rendez-vous avec un médecin aux femmes qui veulent recourir à l'IVG. Ou encore celle de la clause de conscience des médecins, et qui leur permet de refuser de pratiquer un avortement. Selon Le Monde, ces mesures sont « jugées trop sensibles, car susceptibles de rouvrir le débat avec la droite sur l'équilibre de la loi Veil ».