« Dis-donc, elle a de la ressource la petite ! », « Tiens ma cocotte, voilà le dossier que tu as demandé » ou encore le charmant « Elle est de mauvaise humeur, elle doit avoir ses règles » : non ces sympathiques réflexions ne sont pas issues d'un manuel de management des années 60 ou tirées d'un des films OSS 117. Elles sont, selon le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes (CSEP), encore régulièrement entendues sur le lieu de travail par de nombreuses femmes.
Loin d'être une pratique isolée, le sexisme en entreprise semble en effet être, au contraire, monnaie courante : selon une vaste enquête réalisée en décembre 2013 par l'institut de sondage LH2 pour le CSEP, 81% des femmes et 59% des hommes considéraient être « régulièrement confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes » sur leur lieu de travail.
Et à ceux qui auraient pu croire qu'il ne s'agit là que de faits anecdotiques, les sondées affirmaient qu'au contraire, ils avaient directement un impact négatif sur leur confiance en elles : pour 93% d'entre elles, ces manifestations sexistes « peuvent modifier le comportement des salariés » et elles sont 92% à estimer qu'elles « ont un impact sur la confiance en soi » et qu'elles « déstabilisent le travail de ceux qui les subissent ».
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Plus d'une année après la publication des résultats de l'enquête, le CSEP a remis ce vendredi à Marisol Touraine un rapport pour, enfin, faire tomber le tabou du sexisme en milieu professionnel. Metronews, qui a interviewé la ministre des Affaires sociales, liste quelques pistes : « introduire des questions sur le sexisme dans les enquêtes publiques », comme celles de l'Insee, « lancer une campagne nationale de communication dans les médias », « recommander aux employeurs de former l'ensemble des salarié-e-s » … Au total, 35 recommandations ont été émises par le CSEP pour lutter contre le sexisme en milieu professionnel.
Dans son rapport, le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle note également la difficulté qu'ont aujourd'hui les femmes et les hommes à identifier ou à dénoncer le sexisme, « soit parce que les stéréotypes sont à ce point intériorisés que le sexisme du quotidien devient invisible, soit que le coût engendré par la dénonciation du sexisme est jugé disproportionné. »
Pour faciliter l'identification du sexisme au travail et sa répréhension, le CSEP souhaite que les entreprises soient incitées à modifier leurs règlements intérieurs, trop souvent « aveugles au sexisme ». Il conseille aussi de « recommander aux employeurs d'user de leur pouvoir disciplinaire pour affirmer le caractère inacceptable des comportements de sexisme ordinaire. » Pour cela, la formation et la sensibilisation des managers à l'identification des comportements sexistes, dirigeants et autres acteurs du monde du travail est indispensable.
Et les auteurs du rapport du CSEP d'établir la liste, pour les y aider, des trois formes de sexisme les plus répandues : le sexisme « hostile » (« Les femmes sont moins compétentes que les hommes »), le sexisme « subtile ou masque » et qui prend généralement le prétexte de l'humour (« Oh, fais pas ta blonde ! ») et enfin « le sexisme ambivalent, voire bienveillant » comme le paternalisme infantilisant (« Demande à la petite, c'est elle qui gère le dossier »).
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