C'est un fait : pour les aider à mener leur carrière d'une main de maître, les femmes ont à leur disposition des dizaines de livres de conseils. Généralement écrits par les femmes, ils les encouragent à entreprendre, à avoir confiance en elles ou à revendiquer leur leadership. Bref, ils les aident à "survivre" dans le monde sans foi ni loi de l'entreprise. Mais les femmes ont-elles vraiment besoin de tous ces guides pour réussir leur vie professionnelle ?
Ou, prenons la question à l'envers : et si c'étaient les hommes qui avaient finalement besoin de conseils pour mieux travailler avec les femmes ? Pour instaurer un peu de parité en matière de conseils professionnels, voici un petit guide sur la carrière des femmes et à l'attention des hommes.
Que ce soit dit, une bonne fois pour toutes : recevoir des compliments sur son physique/sa tenue/son sourire quand on est au travail, ça fait rarement plaisir. Même si ça part d'une bonne intention. Même si c'est vrai qu'on a fait un effort vestimentaire ce jour-là en prévision d'une réunion clients.
Même chose pour les remarques de sexisme bienveillant (ou non) qui égrènent parfois les conversations pros : "Dis-donc, elle a de la ressource la petite !", "Tiens ma cocotte, voilà le dossier que tu as demandé" ou encore le charmant "Elle est de mauvaise humeur, elle doit avoir ses règles".
Symptomatiques du sexisme ordinaire qui règne encore trop souvent en milieu professionnel, ces "compliments" déguisés et autres sobriquets qu'on croit inoffensifs jouent pourtant beaucoup sur la confiance en elles qu'ont les femmes. Selon une étude de l'institut de sondage LH2 pour le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP), 93% des sondées estiment que ces manifestations sexistes "peuvent modifier le comportement des salariés". Elles sont aussi 92% à considérer qu'elles "ont un impact sur la confiance en soi" et qu'elles "déstabilisent le travail de ceux qui les subissent".
Pensez-y la prochaine fois que vous appellerez Sandrine "ma belle" ou "ma poule" à la machine à café.
Avez-vous remarqué qu'en réunion, les femmes sont beaucoup moins enclines que leurs homologues masculins à prendre la parole ? Pour la CEO de Facebook Sheryl Sandberg et le chercheur de l'université de Pennsylvanie Adam Grant, ce n'est pas étonnant. Dans une tribune parue le 12 janvier dernier dans The New York Times, ils dénoncent la façon insidieuse dont on décourage les femmes de prendre la parole en public. Ils ont même donné un nom à ce phénomène : le manterrupting. "Nous avons tous deux vu ce phénomène se perpétuer, encore et encore. Quand une femme prend la parole dans le milieu professionnel, elle est sur la corde raide. Soit on l'écoute à peine, soit on la juge trop agressive. Quand un homme dit la même chose, tout le monde hoche la tête pour saluer sa brillante idée. Les femmes en concluent que mieux vaut en dire le moins possible."
Or, rappellent-ils, empêcher les femmes de s'exprimer ou bien ne pas les écouter est forcément néfaste pour l'entreprise, cette dernière se privant de points de vue ou d'idées supplémentaires.
Selon une étude parue dans la revue Psychological Science en novembre 2010, les femmes auraient tendance à s'excuser bien plus souvent que les hommes. Pourtant, cela ne veut pas dire qu'elles sont moins compétentes ou moins douées qu'eux. Elles ont simplement plus facilement l'impression d'avoir été dans l'erreur ou d'avoir vexé leur interlocuteur.
Pourtant, cette tendance qu'ont les femmes à s'excuser à tout bout de champ, même quand elles n'y sont pour rien, n'est pas une charmante manie : c'est surtout un puissant frein à leur carrière car cela démontre à quel point elles sont peu sûres d'elles et de leur travail.
Ne l'oubliez pas la prochaine fois qu'une collaboratrice se répandra en excuses pour son retard sur un dossier, ou simplement parce qu'elle a planté l'imprimante.
C'est malheureusement une réalité : alors que l'arrivée d'un enfant impacte rarement la carrière professionnel des hommes, les femmes, au contraire, sont jugées plus susceptibles de se laisser submerger par leurs préoccupations familiales. Ce qui se ressent nécessairement sur leur avancement professionnel : bloquées par le fameux "plafond de verre", elles voient leur position dans l'entreprise et leur rémunération stagner.
D'ailleurs, un rapport publié en 2012 par la DARES (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques) est là pour nous le rappeler : à temps de travail équivalent, les femmes continuent en moyenne de percevoir un salaire de 24% inférieur à celui des hommes.
Pourtant, ce ne sont pas les études qui manquent pour montrer que ce sexisme est totalement injustifié : comme celle qui démontre point par point que les mères de familles sont aussi productives que les autres. Ou celle qui prouve que les femmes sont plus efficaces et moins distraites que les hommes au travail. Ou encore celle réalisée par la très sérieuse Organisation internationale du travail qui affirme que les femmes devraient être mieux payées que les hommes.
Alors, convaincu ?
Dernier conseil : si une femme de votre équipe mérite une promotion ou une augmentation de salaire, n'hésitez pas à lui en faire la proposition. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'à compétences égales, les hommes sont quatre fois plus nombreux à négocier leur salaire que les jeunes femmes. Victimes du syndrome de "la bonne élève", il semble que les femmes n'osent pas réclamer par peur de déplaire, elles à qui on a souvent appris qu'il fallait être" sage " et peu contrariante. "Les femmes s'immergent dans leurs tâches, pensant qu'il suffit d'avoir de bons résultats, comme à l'école, pour être récompensées", explique l'auteure de Les femmes valent-elles moins cher que les hommes ? Annie Battle.
Aussi, plutôt que de vous contenter de féliciter votre collaboratrice pour son implication et sa motivation, essayez plutôt de lui dire "merci" en donnant un petit coup de pouce à sa carrière ou à ses fins de mois.