A seulement 22 ans, Malala Yousafzai est déjà de celles "qui comptent". Cette activiste milite depuis des années pour les droits des femmes pakistanaise. Elle s'est par exemple battue pour la scolarisation des jeunes filles - une "atteinte à l'islam" selon les talibans. A 14 ans, sa philosophie d'empêcheuse de tourner en rond lui vaut des représailles : les talibans tentent de l'assassiner en 2012. Blessée à la tête, elle échappe de peu à la mort.
A peine trois années plus tard, son fonds solidaire lancé (afin de garantir le droit universel des filles à l'éducation) et son premier livre écrit, elle devient la plus jeune lauréate du prix Nobel de la paix. Une victoire sur la barbarie. Peu de temps après, elle est acceptée à l'université d'Oxford. Là-bas, elle étudie la philosophie, la politique, l'économie.
Ado, Malala Yousafzai a déjà tout du "role model". Et c'est donc en toute logique que le magazine Teen Vogue, qui voit en elle "la militante citoyenne la plus célèbre au monde", lui consacre sa Une de fin d'année, au sein d'un numéro riche de sens. Le sous-titre ? Il claque : "Decade of Youth Rising". La décennie du soulèvement de la jeunesse. Comprendre, l'apogée, mais également l'insurrection, des révoltes adolescentes. Et l'activiste de faire le bilan, calmement, d'une décennie de militance teenage...
La jeune femme met évidemment l'accent sur l'engagement multiple (et mondial) de la jeunesse. Un vaste élan qui, dit-elle, "a augmenté au cours de la dernière décennie". Cette vague massive lui a "donné de l'espoir". Un sentiment partagé par beaucoup. Car comme l'énonce encore Teen Vogue, des mouvements aussi majeurs qu'Occupy Wall Street, Black Lives Matter et Youth Climate Strike ont tous été fondés par des jeunes. Des personnalités fortes "qui nous ont tous ouvert les yeux sur les nombreuses injustices auxquelles la jeunesse est confrontée à travers le monde", se réjouit le magazine.
Une occasion pour la revue de rendre hommage à des figures aussi inspirantes qu'Emma González, 20 ans, rescapée de la fusillade de Parkland qui lutte contre la libre circulation des armes aux Etats-Unis, Mari Copeny, 12 ans, qui vient en aide aux enfants défavorisés et fustige les conditions de vie des populations dans la ville de Flint, Jamie Margolin, 18 ans, qui manifeste pour sensibiliser l'opinion publique au réchauffement climatique, ou encore Naomi Wadler, treize ans, qui dénonce les violences faites aux femmes noires au sein de la société américaine. Bref, que des jeunes. Et des femmes ! Les nouveaux visages d'une indignation nécessaire.
Pour Malala Yousafzai, ces éveilleuses de conscience ne se battent pas pour elles, mais pour "des millions et des millions de jeunes" aux quatre coins du globe. C'est ce que démontrent les dernières marches pour le climat, des mobilisations qui se sont étendues du Royaume-Uni à l'Inde. Des images historiques.
"Quand vous voyez tous ces jeunes (et en particulier ces femmes) qui manifestent, et que vous apercevez également des personnes âgées dans la foule, vous réalisez à quel point la voix de la jeunesse peut être puissante", raconte l'activiste dans les pages de Teen Vogue.
"Il y a des centaines et des milliers de femmes et de filles dans toutes les régions du monde qui se lèvent. Nous ne connaissons même pas certaines d'entre elles - et leurs noms ne seront peut être jamais connus - mais elles changent déjà leurs communautés", ajoute-t-elle avec ferveur. Des adolescentes qui ont fait les "années 2010" et ont pour elles de nouveaux outils susceptibles de fédérer les foules (les réseaux sociaux), mais doivent faire attention au "burn out militant". "Il est important de prendre soin de nous. Assurez-vous que vous êtes en bonne santé et bien et que vous dormez suffisamment", conseille-t-elle aux révolutionnaires de demain.
Alors que le magazine Time consacre Greta Thunberg en personnalité de l'année (Forbes la considère même comme l'une des cent femmes les plus puissantes au monde), le message semble limpide à souhait : la décennie écoulée a été celle des jeunesses contestatrices, susceptibles de décocher un cinglant "OK Boomer" aux individus les plus réacs. Et 2020 sera le prolongement de ces mouvements de révolte qui stimulent et inspirent. Une belle prédiction que fait déjà sienne Malala Yousafzai. "Nous [les jeunes] avons déjà fait assez pour élever la voix. La prochaine étape est désormais de changer les choses : soyons les acteurs du changement, impliquons-nous davantage dans ce domaine !", s'enthousiasme la jeune activiste.
Après la parole, les actes. 2020 sera l'année du changement concret ou ne sera pas. Et Malala est déjà ravie d'en être "le moteur". Face à cette année (et décennie) qui s'annonce mouvementée, elle reste tout à fait optimiste. Sa bonne résolution ? Faire toujours plus afin que "toutes les filles dans le monde puissent avoir la possibilité d'aller à l'école et à l'université". L'éducation des jeunes filles n'est pas simplement un droit, c'est un enjeu de première importance. L'avenir leur appartient, pour une bonne raison : c'est elles qui l'écriront.