Who run the world ? Girls. Et Forbes le démontre une nouvelle fois. Le prestigieux magazine de business vient effectivement d'établir sa liste annuelle des cent femmes les plus puissantes au monde. Résultat ? Un classement éclectique où s'entrecroisent politiciennes, femmes d'affaires, artistes et activistes, propageant leur influence aux quatre coins du globe. Quatre critères ont été choisis pour établir ce top : l'argent (PIB, revenus, actifs sous gestion ou valeur nette), les mentions médiatiques, l'impact (nombre d'employés, population du pays) et sphères d'influence.
Au sommet de ce classement trône la chancelière allemande Angela Merkel. Des personnalités d'envergure prennent sa suite : la Française Christine Lagarde, nommée présidente de la Banque centrale européenne cette année, l'Américaine Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants, la Belge Ursula von der Leyen, à la tête de la Commission européenne, ou encore la cheffe d'entreprise américaine Mary Barra, directrice générale de General Motors. Cinq femmes de pouvoir majeures qui occupent toutes un poste de présidente ou de directrice. De quoi inspirer les grandes entrepreneuses de demain.
Inspirant, ce classement l'est d'ailleurs à plus d'un titre. Déjà, parce qu'il bouscule ouvertement les a priori les plus "âgistes" (c'est-à-dire discriminants envers les individus d'un certain âge), dont sont victimes bien des femmes à travers le monde - toutes celles qui, passées cinquante ans, deviennent "invisibles" aux yeux de la société. Face à cela, Forbes insiste sur l'influence toujours aussi vive de figures féminines sexagénaires et septuagénaires, comme Angela Merkel et Nancy Pelosi.
Celle-ci tient d'ailleurs à nuancer sa nomination dans les pages du magazine : "Je ferais une distinction entre pouvoir et influence. Certaines personnes n'ont pas vraiment de pouvoir, mais elles ont une énorme influence. Vous savez qui elles sont", a déclaré la présidente de la Chambre des représentants.
A sa manière, nombreuses sont celles à commenter la notion (un brin viriliste) de "pouvoir". Comme Julie Sweet, patronne de la société de conseil Accenture et seizième femme la plus puissante au monde, pour qui il est avant tout important "d'atteindre un but" collectivement.
Mais justement, c'est quoi, l'influence ? Elle prend bien des visages. L'influence, c'est par exemple celle de la jeune Greta Thunberg, activiste écologiste déjà emblématique à seulement seize ans. L'instigatrice du vaste mouvement Youth for Climate, en plus d'avoir été récemment sacrée "Person of the Year" par le Time, est la centième femme la plus puissante au monde selon Forbes.
Mais l'on pourrait aussi évoquer la philanthrope Melinda Gates. A la tête d'une puissante fondation, l'épouse renommée de Bill Gates occupe la sixième place de ce classement. L'influence, c'est encore celle des business women, telles la Française Isabelle Kocher, PDG d'Engie France (le fournisseur d'énergie national numéro un), la femme d'affaires australienne Gina Rinehart, big boss de l'empire minier Hancock Prospecting, ou encore la Vietnamienne Nguyễn Thị Phương Thảo, qui dirige la compagnie aérienne VietJet Air. Toutes trois figurent respectivement à la 13e, 36e et 52e place du classement Forbes.
Surtout, c'est une vision punchy du leadership au féminin que privilégie Forbes. Celle de la présentatrice et activiste Oprah Winfrey ("Oprah" pour les intimes), 20e du Top, de la chanteuse "girl power" Taylor Swift (71e), qui a notamment dénoncé le sexisme ordinaire de l'industrie musicale, de la sportive multi-championne Serena Williams, laquelle a bien fait rager les misogynes cette année (elle se retrouve en 81ème place) ou de la pop féministe Rihanna (61e), emblème pour beaucoup de "l'empowerment" des femmes - interprète, autrice, comédienne, créatrice de mode. Quelques places plus loin, on retrouve Beyoncé, autre "queen" iconique de ce palmarès qui démontre la puissance des femmes au sein de la culture populaire.
Bien sûr, si ce classement galvanise tant à l'aune de 2020, c'est par sa portée politique. Car si l'on y trouve, entre quelques leadeuses engagées, la très médiatisée Ivanka Trump (en 42e position), force est de constater que celle-ci se retrouve bien en-deçà de la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, Nancy Pelosi. La leadeure démocrate a exigé que soit lancée la procédure de destitution à l'encontre de Donald Trump en septembre dernier. La voir couronnée troisième femme la plus influente par Forbes laisse à penser, à quelques temps de la future course à la présidentielle, que les machos menteurs qui jouissent de leur puissance ont bien du souci à se faire.