
Not All Men. Ce hashtag fleurit sur les réseaux sociaux en commentaires des publications qui adressent les sujets des violences sexistes et sexuelles faites aux femmes. Apparu il y a une dizaine d'années, c'est le crédo des hommes qui se défendent de violer ou d'agresser les femmes. Pourquoi ce réflexe et pourquoi est-ce problématique ?
La journaliste Giulia Foïs, dont nous vous avions déjà parlé dans cet article après son témoignage à l'Assemblée Nationale dans le cadre de la commission d'enquête sur les violences dans le milieu du cinéma, de l'audiovisuel et du spectacle, a publié un livre au sujet de ce "Not All Men". Intitulé "Pas tous les hommes quand même", il est sorti le 6 mars aux éditions La Meute, une maison d'édition féministe.

Dans une vidéo publiée sur le compte Instagram du magazine ELLE, le 2 avril, Giulia Foïs décrypte et démonte le fameux hashtag. Elle rappelle que ce qu'il signifie, dans sa traduction mais aussi pour ceux qui l'utilisent, c'est que "tous les hommes ne violent pas". La journaliste rappelle également qu'il est apparu en réaction à un autre hashtag : "Yes All Women", en français, "oui, toutes les femmes", posté sous les témoignages de femmes qui racontaient avoir été violées.
"Un outil pour nous faire taire"
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Réagir au récit d'une femme qui raconte avoir été victimes de violences en disant que tous les hommes ne violent pas, ça veut dire quoi ? En faisant cela, "vous faites dévier la conversation sur un tout autre terrain et mon récit, je vais, de fait, l'interrompre puisque si j'ai encore un peu d'énergie, je vais tâcher de vous convaincre que vous avez tort, explique Giulia Foïs. Mais mon histoire se sera arrêtée là." En définitive, la journaliste l'affirme, ce hashtag est en fait "un outil pour nous faire taire".
Selon Giulia Foïs, au fond, ce qui se cache derrière ce hashtag, c'est le besoin des hommes d'être rassurés. Les rassurer sur le fait qu'on les aime encore, les rassurer sur leurs congénères et sur qui ils sont, explique-t-elle. "La charge, déjà que tu as toutes les autres (charge mentale du foyer, des enfants, du soin etc ndlr) c'est de me rassurer sur qui je suis", ajoute la journaliste du point de vue des utilisateurs du hashtag.

Si l'examen de ce qui motive l'utilisation de ce hashtag suffit à comprendre qu'il est problématique, Giulia Foïs ajoute qu'il est également très hypocrite. "Ceux qui disent "Not All Men" seront les premiers à préférer que leurs enfants soient gardés par une femme, souligne-t-elle. Ce sera les premiers aussi à dire à leur fille : "attention à comment tu t'habilles quand tu sors dans la rue. Pense à bien te faire raccompagner." Autant de réflexion nourrie par la peur des hommes ou comme la journaliste le résume, "une expérience de mauvaise foi hallucinante voire de complicité tacite car tant qu'on n'ose pas affronter le problème, on le laisse perdurer".
Ce que ces hommes omettent volontairement en se cachant derrière ce hashtag, c'est finalement leur responsabilité. "Ce n'est pas parce que je n'ai pas violé que je ne fais pas partie d'un système dont j'ai profité juste parce que je suis un mec", explique Giulia Foïs.

Les chiffres parlent d'eux mêmes et Giulia Foïs les rappellent. "Bien sûr que tous les hommes ne violent pas, reconnaît la journaliste. En revanche, l'écrasante majorité des violences sexuelles sont commises par des hommes. 97%."
Et à ceux qui voudraient aller sur le terrain des 3% des auteures de violences qui sont des femmes ? "Bien sûr qu'il y a des femmes violentes, mais elle ne font pas système, réplique Giulia Foïs. Je veux bien qu'on passe un temps fou à parler des ces 3%, mais on risque de perdre un chouïe de temps, et le temps on ne l'a pas." Un argumentaire clé en main à ne pas hésiter à reprendre tel quel en cas de besoin.