« Quand on ne donne pas les mêmes droits aux homosexuels et aux hétérosexuels, n’est-ce pas de l’homophobie ? ». La ministre de la Famille Dominique Bertinotti, qui répondait au Journal du Dimanche daté du 16 décembre exprime tout haut ce que certains pro-mariage pour tous pensent tout bas : « Je note un progrès : tous les "anti" éprouvent la nécessité de dire qu'ils n’ont rien contre les homosexuels. Mais dans le même temps, ils leur refusent les mêmes droits. Or quand on ne donne pas les mêmes droits aux Noirs et aux Blancs, on dit que c’est du racisme ; quand on ne donne pas les mêmes droits aux femmes et aux hommes, on dit que c’est du sexisme. »
Cet argument défendu le jour de la manifestation en faveur de l’égalité des droits pour tous, qui a rassemblé à Paris entre 60 000 et 150 000 personnes, avait déjà été avancé précédemment par Thierry Marchal-Beck, président des jeunes socialistes, qui assurait sur son blog le 3 décembre « Monsieur Copé comme tous ses amis de l’UMP, du RUMP, du FN et de l’UDI qui partagent les mêmes idées que lui et qui l’accompagneront à sa manifestation rétrograde sont homophobes ».
À cette époque, Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droit des femmes et porte-parole du gouvernement, interrogée sur le sujet, avait nuancé : « Je ne crois que l'on puisse dire que tous ceux qui sont opposés au mariage pour tous sont des homophobes. »
Chez les « anti » les plus modérés, le spectre du délit d’homophobie fait peur. Ainsi, Frigide Barjot, l’une des principales figures de la « Manif pour tous » de novembre, tenait déjà à se distinguer des intégristes de Civitas ou des propos extrémistes tenus par le cardinal Barbarin ou par Monseigneur Vingt-Trois : « La "Manif pour Tous" dégage dès aujourd'hui toute responsabilité dans des propos ou des actes à caractère homophobe qui se produiraient, et rappelle qu'elle comprend les revendications d'homo-éducation des familles homosexuelles, que la loi actuelle, améliorée dans une nouvelle union sociale, pourra satisfaire. »
Bien que formellement opposée au mariage gay, l'Église soutient également cette dichotomie. Tandis que certains de ses membres ont multiplié les sorties clairement homophobes, les évêques de France ont publié un document dans lequel l'institution fait amende honorable de son passé, concédant que « pendant longtemps les personnes homosexuelles ont été condamnées et rejetées » par la religion. Mais elle affirme avoir, dès 1976, « appelé les catholiques à une attitude de respect, d'écoute et d'accueil de la personne homosexuelle. Dix ans plus tard, elle soulignait que les expressions malveillantes ou gestes violents à l'égard des personnes homosexuelles méritaient condamnation ». Un changement de position qui doit, explique-t-elle, s'accompagner d'une évolution des mentalités.
Selon les derniers chiffres de l'Ifop pour le JDD du 16 décembre, 60% des Français se prononcent en faveur du mariage pour tous. Un autre sondage Ifop publié le 14 décembre affirme que 90% des personnes interrogées affirment percevoir l'homosexualité de manière positive.
Crédit photo : Louis Morin
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