"Pourquoi je devrais être sexy sur les photos en fait ?" Invitée du magazine culturel de France 2, Stupéfiant !, Sara Forestier a livré face à la journaliste Léa Salamé un plaidoyer engagé contre "l'injonction à être sexy", dans un numéro intitulé "Femme dans le cinéma : ces obscurs objets du désir". Comme pour illustrer son discours, l'actrice est apparue sans maquillage. Une initiative qu'elle explique par le fait que le culte de l'apparence est devenu impérieux.
"J'adore le maquillage, mais j'ai un problème avec l'injonction, explique-t-elle. On a une responsabilité, dans le cinéma ou dans les médias, de par le fait qu'on est filmé, on représente une image de la femme. Cela peut paraître stupide, anodin, mais vous vous rendez compte de ce qu'a fait Alicia Keys avec le 'no make-up' ? C'est devenu un mouvement, parce qu'il y a une injonction à être sexy, à être glamour. Or une femme, ce n'est pas que ça".
Ce débat fait suite à l'affaire Weinstein qui, dans son sillage, a engrangé la libération de la parole des femmes concernant les violences sexuelles. Notamment dans le monde du cinéma, où des dizaines d'actrices ont dénoncé l'abus de pouvoir à des fins sexuelles de certains hommes influents. "Pourquoi il y a une tradition de comédiennes qui font des photos nues dans Lui ? Quand ça devient systématique, ça devient pernicieux, c'est pareil pour le maquillage". Un discours engagé et salué par les internautes sur Twitter.
Il y en a un en revanche qui y voit matière à débattre. Au micro d'Europe 1 ce mercredi matin (8 novembre), le philosophe Raphaël Enthoven est revenu sur le passage de Sara Forestier. "On croit naïvement que pour montrer sa vraie nature, il suffit de se montrer au naturel", commence-t-il en citant Rousseau.
Et de poursuivre : "L'erreur de Sara Forestier n'est pas de croire que sa vraie nature se trouve cachée sous la surface du maquillage, c'est peut-être le cas... L'erreur est de croire qu'elle n'est pas maquillée quand elle n'est pas maquillée (...) Parler sans maquillage à l'oeil d'une caméra, c'est se maquiller en celle qui ne se maquille pas. Quand Sara Forestier tombe le masque, elle porte le masque de celle qui tombe le masque (...) Quand elle joue la fille qui se moque de son image, elle donne l'image de la fille qui s'en moque. Elle est celle dont l'image est embellie par l'audace de se montrer soi-disant telle qu'elle est". Concluant finalement : "C'est la caméra qui maquille, pas le maquillage". Comprendra qui pourra.