#JusticiaParaEvelyn. Justice pour Evelyn. Ce mot d'ordre-là, nous l'avons longtemps retrouvé, au gré des élans digitaux et manifestations organisés en l'honneur de la citoyenne du Salvador Evelyn Hernandez - comme celle qui eut lieu, en août 2019, devant le tribunal de Ciudad Delgado (dans le département de San Salvador). Il faut dire que sa situation suscite l'indignation. Il y a deux ans, 40 ans de prison étaient requis contre cette jeune femme. Motif de l'accusation ? Avoir perdu son bébé. En 2016, alors adolescente, Evelyn Hernandez a effectivement vécu une fausse couche. Mais pour la justice salvadorienne, c'était un homicide.
Heureusement, le traitement de l'affaire a évolué au sein du tribunal. Et le 8 juillet dernier, Evelyn Hernandez a finalement été acquittée. Une nouvelle bouleversante. "L'innocence d'Evelyn Hernandez a été reconnue définitivement", s'est d'emblée réjouie la défense de la jeune femme, évoquée par Le Monde. Un verdict juridique confirmé par le fait que le parquet a décidé de ne pas faire appel de cette décision.
Du côté des militantes féministes comme des organisations non-gouvernementales, l'enthousiasme s'est exprimé à l'unisson. La section Belgique d'Amnesty International voit là une "excellente nouvelle pour les droits des femmes au Salvador". Directrice adjointe à la recherche sur les Amériques a Amnesty International, Carolina Jiménez envisage ces conclusions du tribunal comme l'expression d'une vérité à défendre, encore et toujours : "Aucune femme ne devrait être criminalisée pour une complication liée à la grossesse".
Rappelons les faits : le bébé d'Evelyn Hernandez était mort-né. C'est dans des toilettes que la jeune femme a vécu sa fausse couche. D'abord transférée à l'hôpital de Cojutepeque (ville centrale du Salvador), elle a par la suite été arrêtée par les autorités. Au fil des procès qu'elle va vivre trois ans durant, la jeune femme sera successivement accusée d'homicide aggravé avec préméditation puis "d'homicide aggravé par négligence". Des termes qui n'expriment que plus violemment les incidences des lois anti-IVG au Salvador, où, malgré les révolutions féministes mondiales, l'avortement reste (encore et toujours) illégal. Cela fait trente ans qu'il l'est.
C'est dire si ce verdict rassurant a tout d'une victoire salvatrice. Mais attention : ce n'est que le début d'une longue lutte qui n'est pas prête de s'arrêter. "Nous demandons maintenant au Salvador de libérer toutes les femmes incarcérées dans des conditions similaires", poursuit en ce sens Carolina Jiménez. A raison. Car au sein du pays, seize femmes sont encore en prison pour avoir avorté. Une véritable aberration. "Toutes les femmes salvadoriennes devraient avoir droit à la possibilité d'un avortement sûr et légal", déclarait déjà l'an dernier le Collectif National pour les Droits des Femmes. Des mots toujours aussi pertinents.
"Mme Hernandez pourra désormais reprendre son projet de vie sans crainte de devoir affronter un nouveau procès", s'est finalement enthousiasmée la défense de l'accusée, aujourd'hui âgée de 22 ans. A coup sûr, le cas juridique de Carolina Jiménez restera emblématique dans l'histoire du pays : représentatif des injustices subies par les femmes, il démontre l'étendue des (nombreuses) évolutions encore attendues pour que leur corps, leur dignité et leurs droits soient enfin respectés au Salvador.