Aujourd'hui, c'est la Journée mondiale de la ménopause. L'occasion de vous renvoyer à cette longue enquête sur un grand enjeu de société : l'âgisme. Mais aussi de vous partager un témoignage qui compte, celui d'une femme de plus en plus inspirante au fil des années : l'iconique Lio. Car dans le documentaire Ménopositive, diffusé sur Téva ce 17 octobre dernier, Lio a confié... ne plus faire l'amour depuis ses cinquante ans.
De quoi rappeler le titre éloquent d'un docul de Sophie Calle : No Sex Last Night. La chanteuse raconte : "Je suis en abstinence. Ça fait déjà depuis mes cinquante ans. Je ne couche plus. Je ne veux plus de ça, je ne veux plus de ce rapport-là avec mon corps en compagnie des hommes".
Et l'artiste de s'en amuser : "En vérité les hommes ne manquent pas du tout. Mes dix petits doigts me connaissent tellement bien... Mon Dieu, comme ils me rendent service !".
Des mots intimes. Et politiques, oui oui.
"On demande toujours une rétribution trop trop forte à la femme. Je n'ai plus du tout eu envie d'aucune introduction, même pas dans les oreilles. Il n'y a que moi, avec moi", poursuit la chanteuse sexagénaire. Il faut l'écouter : le sujet de l'abstinence est encore plus tabou que le sexe dans notre société... Ce que démontre l'enquête Les corps abstinents d'Emmanuelle Richard.
Normal alors que la voix de Lio dérange.
Alors c'est tout ? Lui qui explique ne plus avoir de rapports sexuels depuis ses cinquante ans ? Mais est-ce vraiment notre affaire ?
Oui oui : ces mots-là sont en vérité très intéressants.
Comme souvent, Lio détonne. Grande féministe, elle nous rappelle que le sexe est politique. Il l'est toujours forcément dans le système hétéro-patriarcal qui est le nôtre. L'interprète de "Fallait pas commencer" l'affirme en détaillant "je ne veux plus de ce rapport-là avec mon corps en compagnie des hommes".
C'est limpide ! Et très militant. D'autres voix féministes elles aussi prônent la grève du sexe. Valorisée par des stars et soutiens du mouvement #MeToo comme les comédiennes Alyssa Milano et Bette Midler, la grève du sexe est une initiative féministe employée depuis des années dans le cadre de luttes comme la mobilisation contre les violences sexuelles et le droit à l'avortement.
"Nos droits liés à la procréation sont supprimés. Tant que nous les femmes n'aurons pas un contrôle légal sur notre corps, nous ne pouvons pas risquer de tomber enceintes. Rejoignez-moi en boycottant le sexe jusqu'à ce que nous retrouvions notre indépendance physique", alertait ainsi Alyssa Milano en 2019, en réaction directe à une loi anti-IVG très restrictive adoptée en Géorgie. Le sexe, c'est, et ce sera toujours, politique.
On pense aussi à l'un des grands succès de la littérature féministe, publié dans la collection de Vanessa Springora : La chair est triste hélas, d'Ovidie. En 2019, la documentariste féministe nous rappelait dans l'Obs que la sexualité est "un outil de négociation" : "Le sexe est au coeur de transactions économico-affectives, c'est un fait, ça s'appelle le patriarcat et ça n'a malheureusement toujours pas été aboli. Dans un monde parfaitement égalitaire, les femmes pourront avoir des rapports sexuels pour elles-mêmes..."
Ou comment arrêter de faire l'amour est, dans la société qui est la nôtre, bien plus qu'une décision perso, une véritable prise de position.
Sans mauvais jeu de mots. Merci de le rappeler, Lio !