Des Unes de journaux qui fleurent bon le patriarcat, des injonctions au silence décochées par des mecs en direct des plateaux télé, le mépris pour la cause féministe mais aussi écologiste, du pur "body shaming" bien décomplexé... Dans notre belle France (mais pas seulement), les pépites sexistes se sont multipliées cette année.
Pour vous épargner cette lourde tâche, nous avons sélectionné pour vous le pire du machisme politique et médiatique de 2022. Bon courage.
C'est une séquence que beaucoup ont comparé au film Don't Look Up. En direct de l'émission télé Good Morning Britain du 12 avril 2022, l'activiste écologiste britannique Miranda Whelehan, membre du collectif Just Stop Oil, a été moquée par le présentateur Richard Madeley. Celui-ci a qualifié son engagement "d'infantile" et ses actions de "perturbantes" et "négatives" pour la société. "Et ce slogan, 'Just Stop Oil', c'est très récréatif, n'est-ce pas, c'est assez infantile. Allez, il y a plus à dire que ça, n'est-ce pas ?", a notamment ironisé ce dernier.
Entre autres remarques rhétoriques. "Reconnaissez-vous que vous vous aliénez déjà des gens qui pourraient soutenir votre cause ?", a également commenté Richard Madeley face à une Miranda Whelehan complètement effarée. Un peu comme nous, en fait. No comment.
"Regardez cette députée Nupes qui donne de sa personne pour la transparence à la chambre !". C'est ce tweet qu'avait décoché l'eurodéputé d'extrême droite Gilbert Collard à propos d'une photo de la députée de la France insoumise Ségolène Amiot, vêtue d'un haut transparent. Très classe.
Un tweet pour le moins libidineux qui s'était notamment vu fustigé par l'eurodéputée écologiste Karima Delli, qualifiant Gilbert Collard de "petit mec mega sexiste".
"Avez-vous regardé ces rassemblements pro-avortement, pro-meurtre ? Les gens sont juste dégoûtants. Pourquoi les femmes qui ont le moins de chances de tomber enceintes sont celles qui s'inquiètent le plus de se faire avorter ?".
Cette fine déclaration émane de la bouche du député républicain de Floride Matt Gaetz. Lors d'une conférence conservatrice destinée aux étudiant·es le 23 juillet 2022, l'homme politique s'en était donc pris aux militantes luttant pour le droit à l'IVG outre-atlantique, ajoutant : "Personne ne veut te féconder si tu ressembles à un pouce". On tient là le gentleman de l'année.
Cette année fut celle des hommes qui balancent sans détour à leurs interlocutrices un définitif "calmez-vous" (voir plus bas). Preuve en est, l'échange très tendu opposant le maire socialiste du Mans Stéphane Le Foll et l'écologiste Sandrine Rousseau le 12 juin 2022. Sur le plateau de France 2, lors de la soirée électorale du premier tour des législatives, ce dernier avait décoché : "Est-ce que vous pouvez vous calmer ?".
"On ne dit pas : 'Est-ce que vous pouvez vous calmer', on est respectueux sur ce plateau", avait réagi la présentatrice Anne-Sophie Lapix. Un exemple comme un autre du sexisme affligeant dont Sandrine Rousseau a été victime toute l'année.
Toutes les idoles ne vieillissent pas toujours bien. On pourrait volontiers se poser la question à propos de Sean Penn, notamment suite aux propos de l'acteur et réalisateur en janvier dernier. L'espace d'une interview accordée à The Independent, Sean Penn s'est laissé aller à un curieux excès de boomerisme. "Je fais partie du club qui croit que les hommes au sein de la culture américaine se sont peu à peu féminisés", avait-il déploré au média britannique.
Et de développer avec la même rigueur intellectuelle, à toute épreuve : "Je ne pense pas non plus que pour être plus juste envers les femmes, nous devrions forcément devenir elles". Subtil. Si ça ne lui fait rien, on préférera désormais écouter Timothée Chalamet. Sans rancune.
"Est-ce que vous me laissez parler, madame ? Votre présentation est très rapide et un peu populiste", avait décoché le 8 février Gérald Darmanin à Apolline de Malherbe lors d'un échange très houleux sur BFMTV.
Aux interrogations frontales de l'intervieweuse ("Est-ce que vous ne vous êtes pas réveillés un peu tard sur les questions de sécurité ?"), le ministre de l'Intérieur avait réagi par un très paternaliste : "Ne vous vexez pas, calmez-vous, madame, ça va bien se passer". "Je vous demande pardon ?", avait répliqué cette dernière, éberluée. Une séquence qui avait beaucoup fait réagir sur les réseaux sociaux.
"Objectif : reconquête !". L'accroche du numéro du magazine Le Film français daté du 30 septembre 2022 en appelait à un élan fédérateur. Mais en ne présentant sur sa couverture... qu'un groupe de mecs. A savoir, les acteurs Pio Marmaï, Guillaume Canet, Vincent Cassel, François Civil, Pierre Niney et Dany Boon, et au milieu, le président de Pathé Jerôme Seydoux.
Un vilain petit côté "boys club" de la part de l'hebdomadaire dédié aux professionnels du monde audiovisuel. En dépit du mea culpa, on aura du mal à oublier ce fâcheux faux pas.
Cette année fut l'occasion pour Valérie Pécresse, ex-candidate LR à la présidentielle, de ressortir les bons vieux clichés sexistes. L'autrice du cultissime "Rien de tel qu'une femme pour faire le ménage" (phrase énoncée pendant la campagne pour les élections régionales de 2015) a notamment déclaré auprès de RTL avoir "la poigne d'un homme, et les mêmes compétences qu'un homme". Une punchline censée appuyer sa crédibilité mais qui n'est peut être pas si judicieuse que cela pour une femme politique se disant féministe.
Comment répartir de la viande de manière égalitaire à tous les membres, hommes comme femmes, d'une tribu ? En avril dernier, Fouzi, l'un des candidats du jeu Koh-Lanta, émettait son opinion à ce sujet : "C'est clair que si c'est moi qui décidais, j'aurais mis des plus grosses portions aux garçons et des plus petites aux filles parce qu'on a besoin de plus d'énergie pour carburer".
Vous avez dit stéréotypes de genre bien vulgos ? Mais non voyons, c'est de la pure logique. A moins que ? "Je suis désolé pour ceux qui ont pu penser qu'il s'agissait de propos sexistes, car je suis loin d'être comme ça", s'était excusé le jeune homme suite au bad buzz suscité.
"Le patriarcat n'a pas disparu en Occident, il n'a jamais existé", assurait l'historien et sociologue Emmanuel Todd l'espace d'une interview accordée au Figaro, à l'occasion de la sortie de son essai Où en sont-elles ? Une esquisse de l'histoire des femmes.
Une sortie audacieuse qui n'avait alors pas manqué de faire réagir les militantes féministes sur les réseaux sociaux, comme l'instigatrice du compte Préparez vous pour la bagarre, Rose Lamy : "Problème réglé, les meufs, on remballe : le patriarcat n'a jamais existé. C'est un homme blanc de 70 ans qui le dit, on peut lui faire confiance"