Tout avait été installé, jusqu'aux chaises, pour permettre aux spectateurs d'assister à la performance de l'orchestre symphonique de Téhéran. Invités à une compétition internationale de lutte, les musiciens devaient jouer l'hymne national iranien. Mais la prestation de l'orchestre symphonique a été annulée au dernier moment parce qu'il comprenait des femmes.
"Tout d'un coup, ils ont annoncé que les femmes ne pouvaient pas joué sur scène", a déclaré, amer, le chef d'orcheste Ali Rahbari à l'agence de presse Isna. "J'étais choqué, et ai répondu qu'il m'était impossible d'accepter une telle insulte (...) on joue tous ensemble, ou on part. (...) Pourquoi (les femmes) ne seraient-elles pas autorisées à jouer l'hymne national de leur propre pays ?", a-t-il ajouté.
C'est la première fois depuis sa création en 1937 que l'orchestre symphonique de Téhéran est interdit de jouer par les autorités religieuses parce qu'il comprend des femmes parmi ses musiciens même si depuis la révolution islamique de 1979, aucune femme chanteuse ou musicienne n'est autorisée à se produire seule sur scène.
Toutefois, rapporte Isna, l'orchestre iranien a vu ces derniers mois plusieurs de ces concerts annulés sans explication et alors qu'il jouissait d'une autorisation officielle. Selon l'agence, ces annulations sont perçues par de nombreux Iraniens comme une manoeuvre de la part des autorités ultra-conservatrices du pays de faire pression sur le président modéré Hassan Rohani suite à l'accord passé avec les Etats-Unis sur le programme nucléaire iranien. Depuis le mois de juillet, mois au cours duquel l'accord entre les deux puissances a été conclu, l'Ayatollah Ali Khamenei n'a cessé de mettre en garde contre les risque "d'infiltration" de la culture américaine dans la société iranienne.
C'est loin d'être la première fois que les autorités religieuses du pays s'opposent si ouvertement aux femmes issues du monde de la culture. Fin octobre, ce sont les comédiennes Chakameh Chamanmah et Sadaf Tahérian qui ont été interdites d'écran par le ministère de la Culture et de l'Orientation islamique pour avoir posé tête nue sur les réseaux sociaux. "L'acte de ces deux actrices témoigne d'un manque d'affection chez elles et de leur caractère faible. Selon nos règles, ces personnes-là ne peuvent plus travailler officiellement. Nous ne les considérons plus comme des artistes", avait alors déclaré le porte-parole du ministère Hossein Noushabadi.