« Ça fait 24 heures que je suis à la frontière saoudienne. Ils ne me donnent pas mon passeport, ne me laissent pas passer et le ministère de l’Intérieur ne réagit pas ». C’est en ces termes que Loujain al-Hathloul a révélé, dimanche dernier via son compte Twitter, la situation ubuesque dans laquelle elle se trouvait. En effet, cette activiste saoudienne en provenance des Émirats arabes unis et qui tentait de rejoindre l’Arabie Saoudite a été bloquée pendant 24 heures à la frontière, avant d’être finalement arrêté par les autorités saoudiennes. Sa faute : avoir voulu entrer dans ce royaume ultra-conservateur au volant de sa voiture, alors même que la conduite y est interdite aux femmes. « Si quelqu’un m’apportait un cheval ou un chameau jusqu’à la frontière, je serais peut-être autorisée à entrer », a ainsi ironisé la militante, qui avait posté plusieurs photos d’elle-même au volant avant son arrestation.
Précisant que son permis était « valide dans tous les pays du Conseil de Coopération du Golfe » – qui comprend les Émirats arabes unis, le Koweït, le Qatar, le Bahreïn, Oman et l’Arabie saoudite –, la militante a affirmé dans un autre tweet posté lundi matin que les douaniers n’avaient pas d’autres choix que de la laisser poursuivre son chemin. « Les douaniers n’ont pas le droit de m’interdire l’entrée même si, à leurs yeux, je suis une « contrevenante » car je suis une Saoudienne », a-t-elle fait savoir. Un état de fait confirmé par sa sœur, Alia al-Hathloul sur son blog ; cette dernière expliquant que selon un accord inter-gouvernemental, « un conducteur détenant un permis de conduire délivré dans un pays du Golfe a le droit, sans entamer aucune démarche, d’utiliser son permis dans un autre pays du Golfe. Cet accord ne fait pas référence au sexe du conducteur. En effet, les femmes peuvent conduire dans tous les pays du Golfe à l’exception de l’Arabie ». En résumé, et ainsi que l’explique france24.com, Loujain al-Hathloul est empêchée de conduire et donc d’entrer dans son propre pays alors qu’elle peut prendre le volant dans les États voisins.
Ce n’est pas la première fois que des Saoudiennes défient les autorités politiques et religieuses pour obtenir le droit de conduire. En octobre 2013, plusieurs d’entre elles s’étaient ainsi filmées au volant de leur véhicule dans le cadre de la campagne Women to Drive. Reconduite en octobre dernier, l’initiative a malheureusement été bien moins suivie en raison des menaces proférées par le gouvernement saoudien quelques mois plus tôt. Le ministère de l’Intérieur avait ainsi prévenu qu’il « appliquera avec fermeté les règlements contre quiconque contribuera d'une quelconque manière à violer la cohésion sociale. »