Le guide du zizi sexuel a été la bible sex-ed de toute une génération d'enfants et d'ados. Best-seller des éditions Glénat, l'ouvrage du dessinateur Zep dénotait par son humour, sa pédagogie positive et ses fantaisies pop-up potaches (dont ce fameux trou au détour d'une page, où l'on pouvait introduire son doigt), mais aussi par sa vision décomplexée de l'éducation sexuelle : port du préservatif, puberté, rapport à l'autre et à son corps, anatomie, définition du désir et des émois, Zep évoquait tout sans chichis, avec clarté et dérision.
Et alors que Titeuf poursuit ses aventures (un futur album est déjà prévu), ce manuel culte revient sur le devant de la scène dans le cadre d'une réédition salutaire. Autrement dit, le Guide a été enrichi, enfin ! 19 ans après sa première apparition, il fait son retour au sein des librairies en abordant une ribambelle de nouvelles thématiques : il sera notamment question du cyberharcèlement, du consentement et de la question du genre. Toutes ces thématiques qui, en deux décennies, se sont vues complexifiées. Indispensable, donc, de s'y attarder.
Et ce n'est pas tout. "Avec cette réédition, j'ai même appris à dessiner un clitoris !, explique Zep à BFM TV. Et ce avec des gens qui sont des grands spécialistes du sujet. J'ai appris que le clitoris était la zone du corps humain qui a le plus de terminaisons nerveuses. Je fais partie d'une génération de gens qui ne savaient pas ce qu'était un clitoris et c'est très graphique : on dirait un super-héros, un oiseau de SF, il pourrait être dans un album de Moebius", s'amuse encore l'artiste. Education et second degré : l'esprit bon enfant est toujours là.
De quoi se rassurer quant à la qualité de ce Zizi sexuel de la génération Z.
"Il y a des sujets qui sont arrivés depuis 20 ans, dont on parlait très peu avant. Des termes ont pris beaucoup plus d'importance, comme le consentement", explique encore Zep à l'AFP.
Accompagnées des textes de l'illustratrice et scénariste Hélène Bruller, les mentions de nouveaux mots-clés comme "Consentement", "LGBTQ" et "Genre" seront donc largement développées à l'adresse des nouvelles générations. Une revisite éditoriale qui est venue à l'esprit de Zep et de ses éditeurs après avoir découvert que les lecteurs et lectrices d'hier, depuis devenus parents, continuaient à acheter le fameux guide. Le mot d'ordre de l'initiative ? La bienveillance, bien sûr.
Et la "légèreté", aussi. De l'insouciance, oui, mais sans inconscience. Surtout quand il s'agit d'aborder des sujets volontiers tabous comme le cyberharcèlement, les agressions sexuelles, l'homophobie. D'une décennie à l'autre, force est de constater que le rôle du Guide du zizi sexuel perdure : être le déclencheur d'un dialogue entre enfants et adultes, ou bien entre camarades de classe. En abordant la pornographie par exemple.
"C'est important de redire que le porno c'est de la mise en scène - parce qu'autrement il devient leur principal éducateur sexuel. Et donc à l'adolescence, où on a très envie de ressembler à la norme, ils risquent de faire la même chose que ça sans forcément y prendre du plaisir", détaille l'artiste à BFM TV.
On le comprend volontiers, Zep cherche toujours à informer, mais sans alarmer. Il explique : "J'ai toujours trouvé que l'éducation sexuelle était traitée sous l'angle de la prévention : les pédophiles, les prédateurs, les problèmes de santé, les risques d'hygiène. Ce sujet devenait très anxiogène et je trouvais ça dommage. C'est important d'en parler, mais la sexualité est aussi un sujet vachement rigolo qui promet plus du plaisir que des problèmes".
Et des problèmes, le dessinateur en a eu volontiers depuis la mise en rayons du livre. Le plus fracassant ? La polémique bidon créée de toutes pièces par le Président brésilien Jair Bolsonaro. En 2018, le politicien d'extrême droite accusait le best-seller d'avoir "perverti" la jeunesse de son pays. Et lui reprochait même d'être diffusé aux enfants sous la forme d'un "kit gay" - une insulte dans la bouche du leader. Zep s'en était évidemment amusé, dessin à l'appui. Oui, le Zizi sexuel énerve les fachos : raison de plus pour le célébrer.