« L’adolescence est un état, ce n’est pas une « crise » », souligne le Dr Alain Meunier. Dans le jazz, la note bleue est celle qui fait passer le musicien d’une gamme à une autre. L’adolescence a un rôle de transition similaire ; elle permet de passer de l’enfance à l’âge adulte. Outre sa passion pour le jazz, ce psychanalyste s’intéresse de près à cette période transitoire, ponctuée de transformations majeures, où des maux spécifiques tels que la violence, les fugues ou les troubles alimentaires, notamment l’anorexie peuvent surgir. En 1997, le Dr A. Meunier crée la Note Bleue, une association loi 1901 qui propose une écoute spécifique aux adolescents en souffrance psychologique. Son fer de lance : la lutte contre les troubles alimentaires chez les adolescents. Il s’agit de comprendre, aider et orienter les anorexiques et leur famille. Aujourd’hui en France, près d’1 adolescente sur 10 serait anorexique. Si la maladie touche en majorité les filles, certains garçons n’y échappent pas. « Les garçons passent souvent par un mode de réponse différent : la drogue, l’alcool, les fugues, la violence… », précise le psychanalyste.
Et si les médias parlent de plus en plus de ce trouble auquel correspond un blocage à l’adolescence, pour le fondateur de La Note Bleue, la manœuvre est bénéfique car elle a permis avant tout de sensibiliser le regard des parents. «L’ennemi avance masqué, il faut être vigilent ». D’où l’intérêt d’un diagnostic précoce. « Avant que la presse ne s’en mêle, les anorexiques avaient 21 ans et on les récupérait en réanimation. Maintenant, les parents nous amène des jeunes filles de 9 à 13 ans ; l’urgence est moindre».
La Note Bleue tente d'aider les anorexiques à être compris, et de lutter contre les préjugés médiatisés et la psychiatrie institutionnelle. « Les anorexiques ont été pendant très longtemps pris pour des psychotiques parce qu’ils disaient (et disent toujours d’ailleurs) qu’ils avaient une petite voix dans la tête qui leur parlait, pour des hystériques, pire, pour des schizophrènes et on leur administrait alors des neuroleptiques. », explique le Dr A. Meunier. Pourtant l’anorexie est un syndrome à part entière, non pas le symptôme d’une autre maladie.
Aujourd’hui la prise en charge est principalement hospitalière. Elle intervient tardivement, lorsque les signes physiques sont importants et qu’il devient indispensable d’agir. L’adolescent passe par le service des urgences puis dans un service psychiatrique. Les médecins ont alors face à eux un adolescent en danger vital. Ils vont devoir le "renutrir" contre son gré. Les traitements vont être souvent extrêmes. On va par exemple l’enfermer dans une pièce jusqu’à ce qu’il accepte de s’alimenter (on appelle aussi cela le contrat de poids). Ou alors on le nourrit de force avec une sonde ou une perfusion. Les protocoles adoptés sont désastreux au niveau psychologique.
A l’opposé, la Note Bleue propose un traitement dit « en ville et individuel, rythmé par des consultations entre différents spécialistes travaillant conjointement autour de la nutrition, de l’image de soi et du corps. Nos méthodes sont difficilement transposables en milieu hospitalier » explique le psychanalyste. Dans les hôpitaux, les parents sont systématiquement écartés avec toute la culpabilité qu’il faut. A notre niveau, il s’agit de véritables alliés thérapeutiques de force ».
« Toute une série d’accès (ligne téléphonique, msn, Facebook…) a été aménagée de manière à contourner la forme d’information primaire du type « allez va chez le docteur ». Ils se braquent et on perd alors très rapidement 6 mois », constate le spécialiste. Les jeunes ont besoin d’attention, d’écoute. C’est ce que propose la Note Bleue.
C'est parce qu'ils rejettent souvent, dans le déni, le corps médical qu'une seconde ligne téléphonique se met en place, SOS Anor. Cette écoute est tenue par d'anciennes patientes qui ont traversé des troubles identiques et qui pourront apporter aux adolescents un sentiment de compréhension. Un suivi téléphonique pourra être engagé, un accompagnement qui vise à les amener vers la levée du déni, la prise de conscience de la maladie jusqu'à ce que la demande d'une prise en charge surgisse. Le premier stade est celui du groupe de parole animé par des psychologues. « Ils vivent avec un masque ; ils vivent dans le mensonge par rapport à la nourriture et donc dans le mensonge par rapport à toute leur vie. Tout d’un coup, face à des personnes qui vivent la même chose et à qui ils ne peuvent pas raconter des histoires, forcément le masque tombe. Ils finissent par se conseiller entre eux d’aller voir un médecin », constate le fondateur de l’association. Psychologues, diététiciennes et psychomotriciennes prennent alors le relais pour qu’ils retrouvent un équilibre alimentaire et une image corporelle valide.
La note bleue
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