Depuis les révélations de vendredi dernier, qui ont transformé la victime présumée de Dominique Strauss-Kahn en menteuse invétérée soupçonnée d’escroquerie, le malaise gagne les associations qui se sont efforcées de défendre son droit à la parole face à l’ex-patron du FMI. Le syndicat des femmes de chambre, qui s’était mobilisé le 6 juin devant le tribunal de New York pour soutenir Nafissatou Diallo, n’en revient toujours pas. Pour les féministes françaises, pas question de refermer la boîte de Pandorre et risquer de perdre les bénéfices du débat enfin ouvert sur le sexisme et les rapports de pouvoir entre hommes et femmes.
Lors de son discours de clôture des rencontres féministes d’Évry ce week-end, Caroline de Haas, a souhaité mettre les points sur les i, à propos des nouvelles données de l’affaire DSK : « Nous ne savons pas ce qui s’est passé ou non à New York. Je tiens à rajouter que s’il ne s’est rien passé, c’est une bonne nouvelle » et de poursuivre : « Quelles que soient les conclusions de l’affaire de New York, si, dans les jours qui viennent, la tentation existait d’instrumentaliser un cas individuel pour décrédibiliser la parole de centaines de milliers de femmes qui en France, sont victimes de violence, nous serons là à nouveau pour le dénoncer. » Au moins 75 000 femmes sont violées chaque année en France, « lorsqu’on remet en cause leur parole, c’est notre parole à toutes qu’on dénigre », déclare la présidente d’Osez le féminisme, « (...) démonstration flagrante que nous vivons encore dans une société patriarcale, dans laquelle le contrôle sur le corps des femmes reste un enjeu de pouvoir. »
De son côté le Collectif national pour les droits des femmes, lance un appel à la vigilance dans un communiqué paru ce matin, « Nous savons l'effet dévastateur de ce genre d'événement sur la prise en compte des violences faites aux femmes. Mais il faut chasser de notre esprit le mythe de la victime idéale et parfaite. Celle-ci n'existe pas. Qui peut affirmer qu'une prostituée, avec toute la stigmatisation qu'elle subit de la part de la société, ne peut être violée ? » La quelconque issue de l’affaire DSK ne devrait pas, selon l’association, faire cesser « le début d'introspection d'une partie de la société. Il faut continuer à remettre en cause la confusion entre drague et libertinage d'une part et violences sexuelles de l'autre. »
Les rencontres « Féministes en mouvements » du 2 et 3 juillet à Évry se sont par ailleurs conclues par la signature d’un texte présentant 10 exigences pour l’égalité en vue de la présidentielle de 2012 :
1. La création d’un ministère d’État des droits des femmes et d’une administration dédiée, dotés de moyens d’intervention conséquents et appropriés.
2. Que l’égalité professionnelle et salariale devienne une priorité nationale : en contraignant les employeurs et employeuses à mettre en place l’égalité réelle sous peine de sanctions, en développant le service public de la petite enfance et en créant celui des personnes dépendantes.
3. Que l’éducation à l’égalité entre les femmes et les hommes fasse partie intégrante de la formation des actrices et acteurs éducatifs, comme des programmes d’enseignement, de la petite enfance à l’université.
4. Que la lutte contre toutes les formes de violences et de discriminations envers les femmes se traduise notamment par la mise en œuvre des dispositifs existants et l’affectation de moyens adaptés.
5. Que l’accès libre et gratuit à la contraception et à l’IVG soit garanti sur l’ensemble du territoire et que l’éducation à la sexualité devienne une priorité.
6. Que la parité dans les instances de décision politique soit effective à tous les niveaux de représentation dès les législatives de 2012 et que la réforme territoriale soit profondément revue sous cet angle.
7. Que les droits des personnes soient les mêmes pour toutes et tous quelle que soit leur identité ou leur orientation sexuelle.
8. Que l’État impose à l’échelon européen une harmonisation par le haut des droits des femmes.
9. Que l’État favorise toutes les politiques en faveur des droits des femmes dans le monde et accorde le droit d’asile aux victimes de violences sexistes ou sexuelles, dont les femmes victimes du système prostitueur. Il faut enfin régulariser les travailleuses et travailleurs sans papiers.
10. Que l’État reconnaisse comme essentiel le travail mené par les associations féministes et leur affecte des financements pluriannuels conséquents, indispensables à la mise en œuvre d’actions pérennes.
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