2015 est une année décisive pour les femmes saoudiennes, qui viennent d'obtenir le droit de voyager seules mais aussi et surtout celui de voter et de se présenter aux prochaines élections municipales. Une avancée de taille, dans un pays souvent montré du doigt pour ses règles extrêmement restrictives envers les femmes. Il aura d'ailleurs fallu 3 ans aux autorités pour promulguer cette loi, annoncée en 2011 par le défunt roi Abdallah. Pour faire accepter cette petite révolution dans un pays où le conservatisme wahhabite est tout puissant, ce dernier a dû convaincre le haut clergé religieux de donner son accord. Une étape obligatoire, même si la famille royale semble aujourd'hui consciente de la nécessité de faire évoluer le statut de la femme saoudienne :
"Ils soutiennent un wahhabisme (courant traditionnel qui se distingue par une lecture littérale de l'islam et par son aspect rigoriste et puritain-Ndlr) plus national, plus moderne, plus conforme à l'image du royaume à l'étranger, plus approprié d'un point de vue économique", explique Stéphane Lacroix, auteur du livre Les islamistes saoudiens, une insurrection manquée, au micro de Radio Canada.
Afin de montrer sa détermination, le roi avait désigné une trentaine de femmes de premier plan pour intégrer la Choura, le conseil consultatif du pouvoir royal. Malgré la désapprobation d'une partie de la classe politique ultra-conservatrice, il avait promulgué un décret officiel pour leur réserver 20% des sièges de l'assemblée.
Suite à la mort du roi saoudien Abdallah en janvier 2015, c'est donc finalement son demi-frère et successeur, Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, qui accordera le droit aux femmes saoudiennes de se rendre dans les isoloirs à partir du 12 décembre 2015. C'est à cette période que se tiendront les élections municipales dans la principauté du Golfe, élections où elles auront d'ailleurs la permission de se présenter en tant que candidates. Une mesure de bon sens, à l'heure où les femmes saoudiennes sont près de 56,6% à faire des études supérieures, mais seulement 15% à être officiellement actives.
Mais si les femmes pensaient pouvoir s'exprimer avec force face à leurs opposants masculins, c'est raté. Afin de respecter les principes relatifs à l'application de la charia, les femmes élues et désignées par le roi, devront siéger dans une pièce séparée. Un principe de non-mixité qui sera également la règle dans les bureaux de votes, où des isoloirs spécifiques sont en train d'être élaborés à leur intention, comme l'explique Sarah Khazindar, responsable d'Amnesty Internationale, dans les colonnes d'Ouest France : "Des travaux sont réalisés en ce moment dans les établissements publics, pour aménager une section d'isoloirs séparée pour les femmes".
Mais cette mesure symbolique reste un gros progrès pour les femmes de la société saoudienne, qui espèrent bientôt pouvoir conduire ou encore choisir librement leur futur époux. Désormais, le Vatican reste le seul état au monde où les femmes n'ont pas le droit de voter...