Santé
Pourquoi il est nécessaire d'allonger les délais de l'IVG
Publié le 29 septembre 2020 à 13:05
Par Pauline Machado | Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Dans une tribune publiée sur "Libération", élu·e·s, soignant·e·s et féministes demandent l'allongement de l'IVG. "Pour que la France réaffirme le droit des femmes à disposer librement de leur corps", et que l'accès à l'avortement ne dépendent plus de leurs moyens.
Le délai de l'IVG bientôt allongé : pourquoi c'est nécessaire Le délai de l'IVG bientôt allongé : pourquoi c'est nécessaire© Abaca
La suite après la publicité

Le 8 octobre, dans le cadre de la proposition de loi transpartisane visant à renforcer le droit à l'avortement, l'Assemblée nationale étudiera, en première lecture, un allongement des délais légaux d'interruption volontaire de grossesse (IVG) de deux semaines, les faisant passer de 12 à 14 semaines. Ce lundi 28 septembre, journée mondiale du droit à l'avortement, plusieurs élu·e·s, soignantes et associations féministes ont publié une tribune détaillant pourquoi ce projet était essentiel.

"La loi française autorise l'avortement jusqu'à douze semaines de grossesse. Chaque année, en France, quelque 3 000 à 5 000 femmes sont contraintes de partir avorter à l'étranger du fait du dépassement des délais légaux (l'Espagne autorise déjà l'IVG jusqu'à 14 semaines sans justification, ndlr)", détaillent les signataires dans les colonnes de Libération. "Et combien d'autres ne peuvent assumer les nombreux frais que cela implique en matière de déplacement, d'hébergement et de coût de l'intervention ?"

Ghada Hatem, gynécologue, fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, Laurence Rossignol, ancienne ministre des Droits des femmes et sénatrice PS, le collectif Minute Simone ou encore l'actrice et réalisatrice Julie Gayet, toutes signataires du texte, estiment que ces coûts discriminent justement un nombre incalculable de personnes enceintes qui devront assumer leur grossesse jusqu'au terme. Et l'affirment : "Les conséquences (...) peuvent être dramatiques : problèmes psychosociaux, rejet ou abandon du bébé, difficultés dans l'exercice des fonctions parentales."

"Si vous avez les moyens, vous avez une chance de plus"

Interrogée par Aufeminin, Mélanie Horoks, médecin à la Maison des femmes de Saint-Denis, revient sur les inégalités sociales et économiques auxquelles sont confrontées celles qui ont dépassé les délais. "Si vous avez les moyens, vous avez une chance de plus, comme dans beaucoup de domaines d'ailleurs... C'est très injuste." Pour la spécialiste, cette loi représenterait une véritable avancée pour les droits des femmes. "Ce serait aider un certain nombre d'entre elles, pour qui les circuits se compliquent énormément parce qu'elles n'ont pas été prises en charge à temps."

Elle évoque aussi la clause de conscience, dont la suppression sera également examinée le 8 octobre, et son caractère contreproductif lorsqu'inscrit dans la loi. "C'est une manière de stigmatiser cet acte d'avortement", lance-t-elle. "En réalité, aucun médecin n'est obligé de pratiquer quelconque acte que ce soit, sauf s'il s'agit de sauver la vie de quelqu'un. Donc ce n'est pas utile de préciser qu'un médecin peut refuser l'IVG, car chacun à ses pratiques et ses affinités... Alors pourquoi l'inscrire dans la loi ? (...) cela appuie sur le fait qu'on aurait matière à refuser de le faire"

Difficultés de parcours plutôt que difficulté à choisir

A celles et ceux qui accuseraient les concernées de ne pas avoir eu recours à la procédure plus tôt, la tribune rétorque : "Nous rappelons qu'aucune d'entre elles ne reporte sa décision par distraction, par manque de temps ou par plaisir. Le dépassement des délais légaux est davantage le reflet des difficultés de parcours et d'accès des femmes à l'IVG que celui de leur difficulté à faire un choix." Et martèle : "Pour que l'IVG soit un droit pour toutes, et non pas seulement pour celles qui en ont les moyens, la loi doit changer."

Pendant le confinement, une proposition d'amendement de la part de Laurence Rossignol visait déjà à allonger, pendant la durée de l'état d'urgence lié à la crise sanitaire, les délais de deux semaines. Celle-ci a cependant été rejeté par le Sénat, à treize voix près, à la fin du mois de mai dernier. Un résultat qui, on l'espère, ne se produira pas une nouvelle fois.

Mots clés
Santé IVG loi News essentielles Politique droits des femmes
Sur le même thème
"Il existe des alternatives pertinentes et éthiques !" : pourquoi la science exploite-t-elle encore des animaux ?
animaux
"Il existe des alternatives pertinentes et éthiques !" : pourquoi la science exploite-t-elle encore des animaux ?
22 juin 2024
"TDS", transgenres, féminisme, marginalités : pourquoi Sean Baker est le renouveau du cinéma indé américain
cinéma
"TDS", transgenres, féminisme, marginalités : pourquoi Sean Baker est le renouveau du cinéma indé américain
7 juin 2024
Les articles similaires
"Elle n'a que la peau sur les os" : le poids d'Ariana Grande continue d'inquiéter ses fans play_circle
cinéma
"Elle n'a que la peau sur les os" : le poids d'Ariana Grande continue d'inquiéter ses fans
15 novembre 2024
Sydney Sweeney : le sex symbol est-elle pro Trump ? play_circle
elections
Sydney Sweeney : le sex symbol est-elle pro Trump ?
5 novembre 2024
Dernières actualités
"On entend encore que les violeurs sont victimes" :  la plaidoirie historique de l'avocat de Gisèle Pelicot au procès de Mazan play_circle
justice
"On entend encore que les violeurs sont victimes" : la plaidoirie historique de l'avocat de Gisèle Pelicot au procès de Mazan
22 novembre 2024
"Les violences sexuelles sont dues à l'immigration" : cet homme politique tient des propos scandaleux play_circle
Politique
"Les violences sexuelles sont dues à l'immigration" : cet homme politique tient des propos scandaleux
22 novembre 2024
Dernières news