Même si elle ne s'est pas encore officiellement déclarée candidate à l'élection présidentielle de 2016, Hillary Clinton ne se retient plus de distribuer les bons et mauvais points. Dans un entretien publié par l'hebdomadaire The Atlantic, et réalisé avant le début des frappes américaines en Irak, l'ancienne secrétaire d'Etat n'hésite pas à dénoncer l'inaction de Barack Obama en Syrie et l'absence d'une « véritable doctrine internationale » de l'actuel président américain.
« Le fait de ne pas aider à bâtir une armée crédible avec ceux qui ont été à l'origine des manifestations contre le président Bachar al-Assad a créé un vide que les djihadistes ont aujourd'hui rempli », a jugé celle qui, il y a 3 ans, avait conseillé à Barack Obama d'aider militairement les insurgés syriens. Le refus du président aurait contribué, toujours selon Hillary Clinton, à favoriser la naissance de ce qui allait devenir l’État islamique.
Et l'ancienne diplomate d'enfoncer le clou en fustigeant le slogan utilisé à maintes reprises par Barack Obama en matière de politique internationale : « Ne pas faire de choses idiotes ». « Les grandes nations ont besoin de principes directeurs, et ''ne pas faire des choses idiotes' n'en est pas un », a souligné l'ancienne sénatrice qui se dit inquiète, à l'instar de plusieurs élus républicains, de voir essaimer les groupes djihadistes dans plusieurs régions du Proche-Orient.
Selon plusieurs observateurs de la vie politique américaine, cette nouvelle sortie d'Hillary Clinton constitue la critique publique la plus sévère formulée par l'ancienne diplomate à l'encontre de Barack Obama depuis qu'elle a quitté ses fonctions en 2012.
Une critique à interpréter à la lumière d'une probable candidature de l'ex-First Lady pour l'élection présidentielle de 2016, rappelle le quotidien britannique The Guardian. En effet, cette stratégie de prise de distance vis-à-vis de Barack Obama intervient alors que la politique étrangère du président ne recueille l’approbation que de 37% des Américains.
« La stratégie d'Hillary Clinton est simple : elle est en campagne électorale, elle sait qu'elle doit se démarquer de Barack Obama pour se démarquer au sein de son propre camp, en vue de la primaire », analyse l'historien et spécialiste des États-Unis François Durpaire.
Pour y parvenir, l'ancienne chef de la diplomatie mise sur ce qu'elle maîtrise. « La stratégie de démarcation d'Hillary Clinton est logique et surtout très confortable, poursuite François Durpaire. Elle joue sur le thème le plus difficile pour l'actuel président, celui que les Américains désapprouvent, à savoir la politique étrangère ».
Un choix nécessaire pour Hillary Clinton, qui a bien conscience de la difficulté de positionnement qui est la sienne. « Le cas de l'élection d'un démocrate après une présidence démocrate (ou celui d'un républicain après une présidence républicaine) est toujours délicat, rappelle l'historien. Il faut porter l'héritage du président tout en proposant quelque chose de différent. On l'a vu, dans l'histoire américaine, avec les difficultés d'Al Gore par rapport à Clinton, de McCain par rapport à Bush, et surtout RicHard Nixon par rapport à Dwight Eisenhower ».
L'ex-First Lady avait d'ailleurs posé la première pierre de son plan d'action il y a quelques mois en publiant le livre « Hard Choices », dans lequel elle émettait déjà des critiques vis-à-vis de Barack Obama, et soulignait sa propre capacité à faire des « choix difficiles » en matière de politique étrangère.
En affirmant que Barack Obama n'a pas de doctrine en la matière, Hillary Clinton passe la vitesse supérieure, au risque de commettre quelques faux pas. Le président américain a en effet jugé utile de réaffirmer avec force sa politique étrangère au cours d'un entretien au New York Times le 8 août dernier. « Dans la montée en campagne d'Hillary Clinton, le livre "Hard Choices" constituait une première étape. Mais en accusant le président américain de laxisme, elle exprime une critique républicaine, de façon à se positionner au centre de l'échiquier politique », conclut François Durpaire. Un grand écart politique qui n'a pas échappé au très conservateur New York Post. Le quotidien titrait, lundi 11 août, « Hillary attribue la crise du Moyen-Orient à la politique stupide d'Obama »...