C'est un fait : il y aurait une recrudescence des violences conjugales depuis le début du confinement. C'est Marlène Schiappa elle-même qui l'énonce au micro d'Europe 1. Face à cela, la secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité femmes-hommes insiste sur le recours aux services d'aide préexistants, comme le numéro d'écoute 3919. Une ligne hélas saturée voire inaccessible en cette période. Dès lors, comment agir pour protéger les victimes ?
La Seine-Saint-Denis, où les violences familiales ont augmenté de 36% depuis le début du confinement (sur la zone de la préfecture de police de Paris, dont fait partie le département), a bien une idée. Le 30 mars dernier, Ernestine Ronai, responsable de l'Observatoire départemental de Seine-Saint-Denis des violences envers les femmes, a ainsi détaillé la mise en place d'une initiative primordiale : le financement de chambres d'hôtel où seront placés, sur décision de la justice, les conjoints et agresseurs. En somme, garantir leur éviction. Une mesure efficace ?
On peut l'espérer. Car cet éloignement dénote par sa cohérence : ce n'est pas à la victime de plier bagages, non, mais à l'agresseur. Un fait d'autant plus logique qu'il prend en considération la situation de la conjointe en période de confinement. "Partir dans l'errance avec ses enfants, vers une chambre hôtel étroite d'où l'on ne peut pas sortir, où l'on ne peut pas cuisiner, où les enfants ne peuvent pas jouer, c'est simplement inimaginable en ce moment", nous explique en ce sens Ernestine Ronai.
D'où l'importance de cet encadrement judiciaire. Assigné à résidence dans une chambre d'hôtel imposée avec l'accord de l'ensemble du tribunal, le conjoint incriminé doit rester dans un périmètre d'un kilomètre dudit établissement. "De cette manière, nous savons où il se trouve et cela sécurise sa conjointe", affirme la responsable de l'Observatoire départemental de Seine-Saint-Denis. Entre éviction du domicile familial et ordonnance de protection, cette mesure est une réponse directe à l'impasse que représente l'adage du "restez chez vous" pour les femmes agressées... mais aussi pour leurs enfants, tout autant menacés.
"Dans la moitié des cas, si le mari est violent envers sa conjointe, il l'est avec ses enfants. Les passages à l'acte ne sont pas rares et c'est pour cela que nous devons réagir. D'autant plus lorsque la famille se trouve être confinée dans un espace plus ou moins grand sans pouvoir sortir, avec un seul ordinateur à disposition, le fait de devoir s'occuper des enfants et de télétravailler, ce qui exacerbe certaines attitudes", déplore encore Ernestine Ronai. Des préoccupations on ne peut plus concrètes. Le 29 mars, on apprenait encore le calvaire vécu par un garçon de 6 ans, plongé en état de mort cérébrale après avoir subi les coups de son père.
Il ne s'agit donc plus de tirer la sonnette d'alarme, mais d'agir. Christophe Castaner, quant à lui, se veut rassurant, chiffres à l'appui. Ces derniers jours et dans le cadre de ces violences, les interventions de police auraient augmenté de 36% sur Paris et la région parisienne, a précisé le ministre de l'Intérieur. "Plus d'interventions ne veut pas dire plus de violences. En Seine-Saint-Denis en tout cas, la police est très réactive", abonde à ce titre Ernestine Ronai. Mais alors que le ministre de l'Intérieur et la secrétaire d'Etat à l'égalité Marlène Schiappa semblent persuadés de l'efficacité d'un système d'alerte récemment mis en place dans les pharmacies, les associations féministes, elles, en appellent encore à un véritable "plan d'urgence".
- Si vous êtes victime ou témoin de violences conjugales, appelez le 3919. Ce numéro d'écoute national est destiné aux femmes victimes de violences, à leur entourage et aux professionnels concernés. Cet appel est anonyme et gratuit.
- En cas de danger immédiat, appelez la police, la gendarmerie ou les pompiers en composant le 17 ou le 18.