Restez chez vous ! C'est un mot d'ordre national que l'on répète encore et encore - à raison - alors que la pandémie de coronavirus continue de faire des ravages et des victimes - en Espagne, en Italie, en France. Mais peut-on vraiment adresser cette injonction aux femmes victimes de violences conjugales, physiques et psychologiques, enfermées dans leur lieu d'habitation aux côtés de leur conjoint et agresseur ? A l'instar des plus précaires et des femmes sans domicile fixe, celles-ci semblent être les grandes invisibles du confinement national.
Une fatalité que le gouvernement ne devrait pas accepter. C'est pourquoi Marlène Schiappa a décidé de faire de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles "une priorité absolue", assure un communiqué officiel, et ce six mois après l'ouverture du Grenelle des violences conjugales. La secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes insiste sur une nécessité urgente et vitale : répondre au mieux à cette situation qui met en danger bien des femmes. Mais les moyens mis à disposition aujourd'hui sont-ils réellement suffisants ?
"Marlène Schiappa et Elena Bonetti, ministre italienne pour l'Egalité des chances et de la Famille, adressent ce jour à la Commissaire européenne à l'Egalité un courrier pour savoir quelles modalités seront mises en oeuvre, afin que l'Union Européenne appuie, dans le cadre de l'effort exceptionnel qui est mobilisé, les dispositifs pour les femmes victimes de violences", développe un communiqué du secrétariat d'Etat daté du 20 mars.
Les deux ministres ont pu échanger lors d'une conférence téléphonique le 19 mars dernier. Aujourd'hui, elles affirment "agir ensemble".
Mais dans le cadre de cet "effort exceptionnel", quels sont au juste les dispositifs mis en place par le gouvernement français ? Et bien, ils laisseraient encore à désirer. C'est par exemple le cas du 3919, le numéro d'écoute permettant d'agir contre les violences. Marlène Schiappa elle-même avait précisé que l'activité de cette ligne serait maintenue mais "limitée". Trop, à en lire ce reportage de L'Obs. "Le 3919 ne répond plus !", alerte le média. Une journée durant, le média a tenté d'avoir quelqu'un au bout du fil. Las : le service d'urgence était soit "momentanément coupé", soit "actuellement fermé". "La ligne est d'ordinaire ouverte de 9 heures à 22 heures du lundi au vendredi, et de 9 heures à 18 heures le samedi, le dimanche et les jours fériés. Or, le 3919 ne répond plus", s'attriste L'Obs.
Si dans son communiqué Marlène Schiappa appuie sa volonté "de ne rien laisser passer" et de "tout faire pour que les femmes confinées puissent se sentir en sécurité et disposer des moyens pour dénoncer leurs agresseurs", la réalité semble être bien différente. Pourtant, la secrétaire d'Etat insiste sur l'éventail des mesures déployées : le maintien des numéros d'écoute, les plateformes gouvernementales gérées par la police et la gendarmerie, l'accompagnement dans des hébergements d'urgence, le maintien des procès au pénal contre les agresseurs.
"La hausse de ces violences durant le confinement n'est pas un risque, c'est une évidence. On ne peut pas uniquement reproduire les mêmes dispositifs, il faut en créer des spécifiques face à cette crise. Créer de nouveaux outils de signalement, proposer des appels 24/24. En période de crise, les réflexes ne seront pas toujours les bons", souligne du côté de France Inter Caroline de Haas, instigatrice du collectif féministe Nous Toutes.
On le comprend, un plan d'urgence semble plus que jamais nécessaire. D'autant plus au vu de l'état critique des centres d'hébergement. Des établissements saturés pour la plupart, en pénurie de masques et de gels hydroalcooliques, dont le manque de moyens ne permet pas le respect des mesures de sécurité sanitaire et de distanciation sociale. "Certaines filles se retrouvent à deux dans une chambre de 26 m2, ce n'est pas l'idéal pendant un confinement", s'alarme Marie Cervetti, la directrice de l'association "FIT - Une femme, Un toit".
"La France et l'Italie s'engagent conjointement à poursuivre ce combat [pour les femmes victimes de violences conjugales] avec l'Union Européenne", assurent cependant Marlène Schiappa Elena Bonetti. Mais désormais et plus que jamais, les mots ne suffisent plus : il faut agir.
- Si vous êtes victime ou témoin de violences conjugales, appelez le 3919. Ce numéro d'écoute national est destiné aux femmes victimes de violences, à leur entourage et aux professionnels concernés. Cet appel est anonyme et gratuit.
- En cas de danger immédiat, appelez la police, la gendarmerie ou les pompiers en composant le 17 ou le 18.
Voici la liste des permanences téléphoniques de la fédération d'Île-de-France des centres d'information des droits des femmes et des familles (CIDFF). Elles sont ouvertes aux femmes victimes de violences.
- IDFF de Paris :
Les permanences juridiques, " violences conjugales " et TGD sont maintenues par téléphone au 01.83.64.72.01
- CIDFF 91 et 77 :
Permanence juridiques et secteur pro accessible du lundi au vendredi de 9h à 13h et de 14h à 17h au standard : 01 60 79 42 26
- CIDFF 92 Nord :
Les juristes répondent aux questions par mail à cidff92nord@gmail.com
Pour les urgences (violences conjugales) permanence téléphonique au 06 23 88 80 74
- CIDFF 92 Sud :
Des entretiens téléphoniques sont assurés au 07 68 41 45 15 ou cidffclamart92@free.fr
- CIDFF 93 :
Permanences juridiques et accompagnement emploi par téléphone avec une attention particulière pour les femmes victimes de violences du lundi au vendredi de 9h00 à 12h30 et 13h30 à 17h00 : 01.48.36.07.56 et par mail cidf93@orange.fr
- CIDFF 94 :
Permanences juridiques aux heures d'ouverture administrative au 06 28 13 92 86 ou au 07 85 24 31 27 ou par mail victimes.cidff94@gmail.com
Pour contacter le siège et pour les professionnels composer le 06 62 45 73 12 ou écrire au cidff94@gmail.com
- CIDFF 95 :
L'équipe administrative et la direction restent mobilisées pour assurer un accueil téléphonique du lundi au vendredi de 9h30 à 12 h30 et de 14h00 à 17h00 au 01 30 32 72 29.
- CIDFF 78 :
Entretiens juridiques par téléphone et les urgences au 01 30 74 21 01 le matin de 9H à 12H30. Le TGD continue à être assuré. Le coté emploi est quant à lui suspendu.