"Pourquoi en avoir fait collectivement un tabou ?", s'interroge Paula Forteza. Dans un billet mis en ligne sur Medium le 23 juin, la députée LREM des Français d'Amérique Latine et des Caraïbes est revenue sur une expérience qu'elle ne souhaitait pas passer sous silence : sa fausse couche, survenue au bout de quatre mois de grossesse. Sans filtre, elle relate les faits. Son décollement de placenta. Cette douleur ressentie au bas ventre quelques nuits durant. Ensuite, son arrivée "en catastrophe" aux urgences. Puis "l'attente, l'incompréhension, l'angoisse". Et le constat médical.
A 32 ans, Paula Forteza a donc subi ce que beaucoup encore n'osent évoquer. En témoignant aujourd'hui, elle tente de poser des mots sur la souffrance qui fut la sienne. Une sensation presque inqualifiable. "La douleur, le vide et le déboussolement" énumère-t-elle avec minutie. Ses mots à elle portent une vocation salutaire plus globale : libérer une parole collective.
"Nous devrions pouvoir assumer plus ouvertement ce type d'expériences" explique la politicienne, pour qui "il y a encore beaucoup à faire pour améliorer le sort des femmes qui vivent une perte de grossesse". Et ce "beaucoup" prend plusieurs formes. En parler bien sûr, ne serait-ce que pour comprendre que l'on est pas seule. Paula Corteza a découvert que sa mère, sa tante et quelques amies proches avaient vécu la même situation. Et "même Michelle Obama !", s'étonne-t-elle. Mais également informer. Préciser ce qu'implique une fausse couche dès les cours d'éducation sexuelle, en faire une campagne publique, inciter les gynécologues à détailler le sujet. Bref, privilégier la mise à disposition d'informations solides et avérées afin d'éviter les théories à la Doctissimo.
"Une séance explicative obligatoire au cours de la prise en charge d'une grossesse pourrait être prévue" suggère la députée qui constate "un manque de repères pour les femmes concernées". Afin d'être entendue, il faudrait que cette prise en considération concerne les deux parties du couple. C'est ce que suggère Paula Corteza. Alors que le corps médical lui a prescrit un mois d'arrêt de travail, son conjoint, lui, a du prendre quelques jours de congés payés. Pourtant, lui aussi était "absolument investi". Pour faire évoluer les mentalités, il faudrait donc faire en sorte de garantir "une plus grande égalité au sein du couple et une déconstruction des rôles et des tâches traditionnellement assignés". Ne pas considérer cette expérience comme "une aventure commune", c'est exacerber l'isolement qui accable les femmes.
Cette égalité du couple pourrait tout d'abord passer, suggère encore la députée, par une mise à jour du congé parental. Car la fausse couche n'est pas simplement un enjeu médical : c'est un sujet politique. Cette évolution des mentalités, Paula Corteza la compare d'ailleurs au droit à la PMA pour les couples de femmes et les femmes célibataires. Reconnaissance sociale, légitimité, informations, écoute... Il y a encore tant à faire pour toutes celles qui vivent encore "dans le secret".