C'est une annonce qu'attendaient de longue date les femmes célibataires et celles en couple avec une autre femme : dès 2018, le gouvernement proposera l'ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à l'ensemble des femmes, et ce quel que soit leur statut marital ou leur orientation sexuelle, au nom de l'égalité. C'est Marlène Schiappa, Secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, qui en a fait l'annonce mardi 12 septembre à l'antenne de RMC en faisant valoir que cet engagement de campagne d'Emmanuel Macron était "une question de justice sociale".
Proposée à l'Assemblée dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique, l'ouverture de la PMA pour toutes les femmes a été largement saluée par les militantes féministes et LGBT sur les réseaux sociaux même si, a précisé Marlène Schiappa, tout se décidera dans l'hémicycle. "Je ne préjuge pas du débat parlementaire", a-t-elle déclaré.
Déjà en juillet, la ministre de la Santé Agnès Buzyn s'était déclarée favorable à une discussion autour de l'ouverture de la PMA à l'ensemble des femmes après que le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) eut rendu un avis favorable. Mais que cela implique-t-il pour les femmes qui jusqu'à présent n'y avaient pas accès, et pour les autres ? On fait le point en 4 questions.
La procréation médicalement assistée, ou PMA, définit l'ensemble des traitements ou techniques prenant en charge médicalement les infertilités (diminution de la fertilité) ou les stérilités (impossibilité d'avoir des enfants). Elle désigne l'ensemble des méthodes chimiques et biologiques qui ont pour objectif la procréation en dehors du processus naturel. Cela comprend la fécondation in vitro (FIV), le transfert d'embryons et l'insémination artificielle.
Pour le moment, la PMA ne s'adresse en France qu'aux couples hétérosexuels en âge de procréer et qui rencontrent des difficultés pour concevoir un enfant. Ils peuvent y avoir recours dans deux cas : s'ils font face à "une infertilité médicalement constatée" ou "pour éviter la transmission d'une maladie grave à l'enfant ou à l'un des membres du couples", précise l'Agence de la biomédecine. Ils doivent alors répondre à un certain nombre de critères pour être éligibles à une PMA : être ensemble depuis au moins deux ans et que la femme du couple soit âgée de moins de 43 ans.
La PMA pour toutes ouvrira le processus aux femmes célibataires et aux femmes homosexuelles désirant un enfant, qui étaient jusqu'ici exclues des critères d'éligibilité et qui, le plus souvent, se tournaient vers l'étranger pour pouvoir concevoir. Si la révision de la loi de bioéthique est votée, elles pourront elles aussi bénéficier des méthodes de procréation artificielle.
D'après France Info, qui cite l'Agence de la biomédecine, 143 778 de tentatives de PMA ont été recensées en France en 2014. Pour 95% d'entre elles, elles impliquaient une insémination avec les spermatozoïdes et les ovules du couple. 24 839 enfants nés en 2015 sont issus d'une PMA, soit 3% des naissances en France cette même année.
Mais ces chiffres ne prennent pas en compte les enfants nés d'une PMA effectuée à l'étranger. Le CCNE estime qu'entre 2 000 et 3 000 procréations médicalement assistées ont lieu hors de France chaque année, le plus généralement en Belgique ou en Espagne, où elle est autorisée pour les femmes célibataires et les couples de femmes. Remboursée en France par la Sécurité sociale sous certaines conditions, les PMA réalisées à l'étranger coûtent cher : entre 800 et 1 500 euros l'insémination artificielle avec don de sperme.
C'est la grande question. Pour le moment, une PMA est prise en charge par l'Assurance-maladie si la femme est âgée de moins de 43 ans. L'organisme rembourse une insémination artificielle par cycle, au maximum six pour l'obtention d'une grossesse. Il prend également en charge jusqu'à quatre tentatives de fécondation in vitro pour une grossesse. Au nom de l'égalité, on pourrait donc espérer que l'ouverture de la PMA à toutes les femmes s'accompagne d'un remboursement universel. Or, quand il a rendu son avis favorable en juin dernier, le CCNE suggérait que "soient étudiées et définies des conditions d'accès et faisabilité, notamment en distinguant la situation différente des couples de femmes et des femmes seules, en maintenant le principe actuel de gratuité des dons et en étudiant les modalités (remboursement refusé ou différencié) pour que l'assurance-maladie ne supporte pas les charges financières correspondantes". Ce qui supposerait de facto un remboursement à deux vitesses, l'un systématique pour les couples hétérosexuels infertiles et stériles, l'autre sous "la forme d'une contribution partielle" pour les couples de femmes et les célibataires. Reste à savoir si le gouvernement suivra ou non cette recommandation. Réponse début 2018.