Si l'on résume la vraie fourrure en chiffres, on obtient 24 milliards d'euros de bénéfice et l'emploi d'un million de personnes en 2017, d'après Le Monde. Malheureusement, on compte aussi environ 56 millions de bêtes tuées dans des conditions terribles pour produire les manteaux, les gants ou les cols qui défileront sur les podiums puis dans les rues. Il faut dire qu'il fait froid en France, et que nos 2°C hivernaux nécessitent au moins un vison long jusqu'aux chevilles.
Ce constat alarmant prouve que l'industrie de la fourrure ne se porte pas si mal, et il est donc plutôt rassurant de voir que les campagnes de sensibilisation contre son usage semblent toucher de plus en plus de marques. Géants du luxe inclus.
Cette année, Gucci, Michael Kors ou encore Calvin Klein ont ainsi déclaré qu'ils renonçaient aux poils de chinchilla ou de lapin dans leurs collections. Plus de vraie fourrure comme chez Stella McCartney, l'une des pionnières de la mode garantie sans cruauté animale, qui a même proscrit le cuir de ses créations. Un pas aussi emboîté par un bon nombre de célébrités et d'enseignes plus abordables.
Plus de vraie fourrure, certes, mais de la fausse fourrure à la place. Car il faut bien que les textures soient diversifiées, conserver une certaine esthétique tendance et répondre à la demande colossale. Et puis maintenant que l'on sait qu'un renard ne s'est pas fait dépecer vivant pour fabriquer notre chapka, on se dit que ça va.
Seulement voilà, peut-on réellement s'en satisfaire ? Et surtout, ces matériaux de substitution ne seraient-ils pas tout aussi nocifs pour l'environnement que leur prédécesseur "naturel", la question maltraitance animale en moins ?
Quand on se penche sur les composants de la fausse fourrure, on remarque que ces pelages soyeux, aussi faux soient-ils, sont confectionnés à partir de vrai plastique. Et le plastique, ça n'a évidemment rien d'éthique. Les particules se décrochent, filent dans les eaux pour finir dans nos océans, et dans le ventre des tortues que l'on essaie justement de préserver en stockant nos déchets recyclables dans la poubelle jaune.
Plus précisément, la fausse fourrure est réalisée à partir de "fibres polymères [d'acrylique] (créées à base de pétrole, d'air, de charbon, d'eau et de calcaire, ndlr), qui sont transformées, teintes et coupées pour correspondre à une texture de fourrure et à une coloration particulières", d'après MakeHow. Une fois fixées sur du tissu, lesdites fibres sont traitées avec des produits chimiques "tels que des résines ou des silicones" qui améliorent le toucher et l'aspect visuel de la matière.
Des produits chimiques et des fibres synthétiques quasiment impossibles à recycler, dont la fabrication requiert une énergie considérable et extrêmement polluante, et qui se dégraderont seulement au bout d'un millier d'années.
Tout cela s'ajoute à un autre inconvénient de la fausse fourrure : son manque de longévité. Car si ce n'est pas la veste qui perd de sa splendeur après une saison (la pluie et les agressions extérieures peuvent avoir sa peau), c'est la tendance et les goûts de son ou sa propriétaire qui en auront raison. Prenez les modèles tout doux rose et bleu pastel de Cos ou H&M qui avaient conquis les influenceuses il y a peu de temps. Un an plus tard, disparues du radar. Mais certainement bien présentes sur des piles de déchets non-biodégradables.
Alors bien sûr, ce triste constat qui contribue à la pollution dramatique de nos océans est une aubaine pour l'industrie de la fourrure véritable, qui elle se dégraderait au bout de six mois. Les spécialistes du genre sautent d'ailleurs sur l'occasion pour glisser le mot magique "éthique" à tout va.
C'est le cas de Keith Kaplan, directeur de la communication du Fur Information Council of America, qui explique notamment à Fashionista que "la traite des fourrures constitue une relation symbiotique cruciale et bien réglée qui permet d'atteindre les objectifs de la gestion et de la conservation de la faune et de la société dans son ensemble." Les pièges en pleine nature (qui blessent et tuent aussi des animaux domestiques) seraient donc bons pour l'équilibre de l'environnement, selon lui.
Aucun mot sur les fermes de fourrure, en revanche, dont l'horreur de l'élevage dans des cages microscopiques, sans soins ni une once d'humanité, a été révélée plus d'une fois.
Au final, c'est à se demander laquelle est la moins nocive, sous-entendu qu'elles le sont toutes les deux. Et surtout à espérer que les projets de fibres végétales voient le jour rapidement pour remplacer ces deux options, au même titre que le Piñatex, le textile fait d'ananas, commence à remplacer le cuir.
En attendant, à choisir, on préférera chiner une fausse fourrure dans une boutique vintage, histoire de limiter la surproduction et la cruauté envers les animaux par la même occasion. Ou simplement ne rien acheter du tout.