"Je suis née avec un problème de peau appelé ichtyose lamellaire", confie Jeyza Gary, jeune modèle américaine, dans une interview pour Refinery29. "C'est rare, ça ne touche qu'une personne sur 100 000." De cette rareté, elle a justement puisé sa vocation : le mannequinat. Une envie de davantage de diversité et de représentation dans une industrie de la mode encore ultra-exclusive.
"Je n'ai jamais vu de femmes comme moi être mannequins, alors j'en suis devenu une", affirme-t-elle. Tout démarre au collège, alors qu'une amie lui laisse un mot touchant dans son album de fin d'année, "Je te souhaite tout le meilleur. Ps : tu devrais être modèle". Jeyza explique qu'elle s'est accrochée à cette phrase jusqu'à atteindre son but.
Sa mère aussi a joué un grand rôle dans le développement de sa confiance en soi. A chaque rentrée scolaire, elle accompagnait sa fille au premier cours et prenait la parole devant la classe pour expliquer sa maladie. Briser le silence et le tabou, et expliquer que l'on peut questionner, mais pas fixer.
"Voici ma fille, Jeyza, et elle a un problème de peau", se souvient la mannequin, qui la décrit comme sa plus grande défenseuse avant qu'elle ne le devienne elle-même. "Combien d'entre vous ont vu un lézard ou un serpent ? La peau de Jeyza est comme ça. Tous les 10 à 12 jours, elle la perd. Ce n'est pas contagieux. Elle est comme tout le monde." Cette routine lui prouve qu'elle a sa place parmi les autres élèves, qu'elle n'était pas à part, et ça la forge.
Si elle passe par une phase pendant laquelle elle se camoufle derrière le maquillage, se dessine des sourcils - sa condition les empêche de pousser - et perd peu à peu son identité (elle avoue qu'elle ne savait pas que "c'était OK de ne pas s'intégrer complètement"), elle reprend vite le contrôle. "Un jour je me suis rendu compte que j'avais besoin de tous ces produits cosmétiques. Alors j'ai décidé d'arrêter", lance-t-elle.
Elle accepte son image pleinement, la célèbre même, et décide de suivre sa passion à la fin du lycée en envoyant des photos à quelques agences de mannequin, portée par l'encouragement de son amie et l'éducation de sa mère.
Après plusieurs refus plus ou moins brutaux (une agence qu'elle relance lui rétorque un sec "Si vous n'avez pas eu de nouvelles, c'est votre réponse"), elle reçoit un mail de We Speak Management, qui prône l'inclusivité et possède une liste de clients longue comme le bras (Glossier, Man Repeller, Sephora, MAC ou encore Glamour US), et lui propose de venir les rencontrer à New York. Elle signe avec eux quelques mois plus tard. Depuis, elle travaille dur et ne manque pas d'ambition.
"Je veux être la meilleure. Je veux être dans Vogue. Je veux être sollicitée par tous ceux qui m'ont rejetée. Il n'y a jamais eu personne que je puisse idolâtrer en grandissant. C'est ma famille qui m'a inculqué que je suis 'assez' et qu'il n'y a rien qui cloche chez moi. C'est ce que je veux être pour d'autres personnes qui ne le voient pas en elles-mêmes."
En deux ans, elle a réalisé une partie de son rêve : poser pour Vogue Italie, et surtout, inspirer quelqu'un. Un jour, suite à une photo postée sur son Instagram prise lors d'un voyage à New York, une femme la contacte. "Elle m'a dit : 'Vos photos me donnent la chair de poule. J'ai une ichtyose lamellaire, mais je n'ai pas le courage de porter un short. Vous me donnez le courage de faire quelque chose que je n'ai jamais fait.' Il ne s'agit pas de moi. Il s'agit de permettre aux autres de me voir et de se sentir encouragés", déclare-t-elle. Un rôle-model est né.