Julie Gayet sera bientôt à l'affiche d'une chronique féministe prometteuse : le film Comme une actrice de Sébastien Bailly, attendu en salles le 8 mars prochain. Le 8 mars, une date qui compte énormément pour l'actrice, puisque Journée internationale des droits des femmes. Et c'est justement la cause féminine qu'a abordé l'artiste sur le plateau de l'émission C à Vous.
Et pour cause, puisque Comme une actrice aborde la difficile expérience d'Anna, comédienne qui n'a plus l'âge d'interpréter "le rôle dont elle rêve depuis toujours", tel que le résume la présentatrice Anne-Elisabeth Lemoine. Un sujet qui n'a rien d'une simple fiction. Julie Gayet le déplore d'ailleurs : "Il y a aujourd'hui des études qui prouvent que beaucoup de femmes, d'actrices, disparaissent au cinéma à partir d'un certain âge".
"Après 50 ans, hop, on rentre dans un tunnel, on disparaît !... Il n'y a plus cette vision de la femme qui vieillit.
C'est vraiment un sujet que cette injonction pour toutes les femmes d'être encore belles", a développé Julie Gayet. C'est là tout un système que dénonce l'interprète de Clara et moi : une société où l'on planque les femmes de cinquante ans et plus, des médias à l'industrie du spectacle, en passant par la scène professionnelle en général.
Un phénomène résumé par l'intitulé d'une commission, citée par Julie Gayet sur le plateau : "Le tunnel des femmes de plus de 50 ans".
Aujourd'hui, en France, une femme sur deux a plus de 50 ans, c'est à dire 51 % de la population féminine et un quart de la population totale, affirme le Manifeste de ladite commission. Or pour Julie Gayet, "c'est quand même énorme !". "Dans les médias, elles ne sont plus que 7%, ce n'est pas du tout représentatif de la société. Donc là, je viens d'avoir 50 ans, je rentre dans le tunnel bientôt !", a-t-elle poursuivi en riant jaune.
Ce que raconte non sans humour Julie Gayet est limpide, et malheureusement loin de se démoder. Cela s'appelle l'âgisme : le fait de discriminer et ostraciser certaines personnes passé un certain âge, et notamment les femmes, cibles de préjugés et remarques sexistes. Difficile à ce titre d'oublier la subtile remarque de Yann Moix décochée au magazine Marie Claire : "Un corps de femme de 25 ans, c'est extraordinaire. Le corps d'une femme de 50 ans n'est pas extraordinaire du tout. Elles sont invisibles".
Ironiquement, l'écrivain polémiste a raison : les femmes de plus de cinquante ans ont tendance à disparaître des radars. Difficile de ne pas mettre cela sur le compte d'un système patriarcal pétri de constructions vieillottes. "À partir du moment où les femmes franchissent le cap "fatal" de la ménopause, elles sortent du groupe des femmes procréatrices. Et elles perdent de ce fait ce qui est considéré depuis toujours comme leur principale fonction sociale", nous explique la philosophie féministe Camille Froidevaux-Metterie.
" Et pourtant, les femmes de cinquante ans travaillent, continuent d'avoir une vie amoureuse et sexuelle, se projettent dans l'avenir et s'incarnent au présent", observe l'autrice. Ce que démontrent bien des associations - comme L'Observatoire de l'âgisme est un collectif, créé début 2008 - et médias, comme le site J'ai piscine avec Simone, créé par la journaliste féministe Sophie Dancourt, donnant de la visibilité à la génération des femmes quinquagénaires - et plus. Idéal pour combattre cette grande disparition.
Et sortir enfin du tunnel.