Terrafemina : Pour quelles raisons avez-vous choisi de filmer un projet de reprise d’entreprise par ses salariés ?
Mariana Otero : J’avais envie de filmer des gens qui essayent de changer les règles de leur vie au quotidien. Un jour, je suis tombée sur un article sur une coopérative. Je me suis dit : « Voilà un lieu où les gens font une révolution à leur niveau. Ils inventent une nouvelle façon de travailler, d’être dans l’entreprise puisqu’ils sont eux-mêmes leurs propres dirigeants ». J’ai ainsi choisi de m’intéresser à la naissance d’une coopérative pour filmer le passage d’un ancien à un nouveau modèle, ce qui implique forcément de bousculer les règles établies.
TF : Comment avez-vous mené à bien ce projet ?
M.O. : Je suis passée par le réseau national des Scop. Mon choix s’est naturellement porté sur l’entreprise de lingerie féminine Starissima car il y avait à la fois des hommes et des femmes, des ouvriers et des cadres, une diversité culturelle, un décor original de petites culottes et soutiens-gorges. Mais je n’imaginais pas la suite des évènements. Je ne savais pas que le patron allait se mettre au milieu du processus de reprise. Tout s’est déroulé devant ma caméra, sans scénario à la base. Je ne savais pas que le réel aurait autant de rebondissements !
TF : Qu’avez-vous voulu montrer ?
M.O. : Je voulais montrer comment des salariés qui s’emparent de leur entreprise qui en deviennent les dirigeants, deviennent plus heureux, même s’il y a des obstacles, des doutes, et au final, l’échec. Ces femmes s’émancipent. Elles trouvent plus de plaisir à travailler, à être ensemble ; elles en deviennent magnifiques.
TF : Peut-on parler de film engagé ?
M.O. : Il s’agit avant tout d’un film humain. C’est de la pensée pratique, pas de la théorie politique ! Il y a une forme d’engagement mais ce n’est pas militant. Ces ouvrières mettent en question tous les principes de base de la politique, notre fonctionnement économique, comment fonctionne notre société en général notamment lorsqu’elles lâchent : « on nous dit pas tout » ou bien « on nous a jamais demandé de penser ». C’est en quelque sorte une succession de prises de conscience au fur et à mesure du projet de coopérative. C’est comme si elles découvraient des choses qui sont presque devenues banales parce qu’on n’y pense pas vraiment. Ces femmes y pensent en pratique. Elles font de la politique, mais pas au sens idéologique du terme.
TF : Qu’avez-vous appris ?
M.O. : La manière dont elles ont participé au film, leur façon d’être face à la caméra et d’en tirer une force ludique, jamais je n’aurais imaginé à quel point cela pouvait être beau. Au départ, elles ne comprenaient pas pourquoi je m’intéressais à elles, puis au fur et à mesure elles ont réalisé que l’aventure dans laquelle elles se lançaient était très intéressante. A la fin, elles deviennent de véritables actrices. Il s’agit d’une véritable aventure avec des rebondissements, des tensions, des émotions, des moments de découragements, de joie... Je n’avais pas imaginé à quel point cela serait fort.
TF : Quel message avez-vous souhaité faire passer?
M.O. : Monter une coopérative, c’est possible ! L’aventure apporte énormément à ceux qui la tentent. Pour ces ouvrières, ce n’est pas l’échec du projet qui est important mais ce qu’elles ont traversé. J’aimerais qu’en sortant de la projection, le spectateur fasse comme elles ; qu’il se lance, n’ait pas peur d’oser, de bousculer les choses. J’espère sincèrement que le film donne envie de les suivre et de partager leur énergie.
Coopératives d'habitants, la renaissance
Docu engagé : moi, la finance et le développement durable
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