
Vit-on une ère de nepo babies ?
Aussi bien dans l'industrie musicale qu'au sein du panorama hollywoodien, les fils et filles de semblent déchaîner les passions et cristalliser un savant mélange de fascination et de haine. Fils et filles de (stars) qualifiés dans la langue de Shakespeare de "nepo babies" (pour nepotism babies) : c'est ainsi que ce phénomène de "reproduction" élitiste est évoqué dans la presse et sur les réseaux sociaux.
Les exemples abondent. Margaret Qualley, fille de Andie McDowell, Lily Rose Depp, fille de Vanessa Paradis et Johnny Depp, Bryce Dallas Howard, dont le père est l'immortel réalisateur et producteur Ron Howard, Maude Apatow, fille de Judd Apatow, roi de la comédie US, Maya Thurman Hawke, dont les parents ne sont autres que Uma Thurman et Ethan Hawke, excusez du peu.

A cela faudrait-il encore ajouter les filles de M Night Shyamalan, que ce dernier met lui-même en avant - en tant qu'actrices, compositrice, en épaulant au rang de producteur - et tant d'autres encore : Zoe Kravitz, Kaia Gerber, Dylan Penn... Sans oublier la flopée de fils de : Jaden Smith, Colin Hanks, Patrick Schwarzenegger, John David Washington, Jack Quaid, et la liste est encore longue.
Bref, les nepo babies sont partout et suscitent des réactions exacerbées. Mais alors que les internautes s'enflamment, on se demande tout de même si toute cette haine n'est pas exagérée ? D'autant plus face à un "phénomène" loin d'être nouveau...
Les fils et filles de éveillent des débats sur la Toile.

D'aucuns y voient l'incapacité d'une industrie à remettre en question les privilèges qui empêchent une certaine diversité, une inclusion et une égalité des chances. Alors que Hollywood, mais aussi l'industrie musicale, sont remis en question par des mouvements contestataires, comme #MeToo, perdure l'idée inverse d'une "élite" plus stable que jamais, d'une forme de bourgeoisie qui irait à l'encontre des grands changements souhaités au sein de l'industrie.


Les nepo babies sont l'incarnation d'un privilège.
Qui prend d'autant plus d'importance dans un milieu qui alimente volontiers le culte de la célébrité. La voie des nepo babies semble alors toute tracée, et limpide en une époque où les fantasmes autour de la richesse et de la notoriété semblent plus forts que jamais - au moins depuis l'avènement de la famille Kardashian au sein des émissions de téléréalité.

L'analogie paraît d'autant plus évidente lorsque des influenceuses, parmi les plus puissantes du monde, comme celles du clan Kardashian, assument leur statut de famille. Et la notoriété d'un nouveau membre de succéder à celle d'un précédent.
Dans une enquête dédiée au règne de ce népotisme, Vanity Fair ironise : "Pour citer le New York Magazine : elle a les yeux de sa mère. Et son agent !".
Mais s'exerce cependant à décrypter la chose : "Par delà l'intérêt marketing que peuvent représenter ces « Nepo Babies » au patronyme déjà connu, auprès d'un jeune public connecté sur les réseaux sociaux, il y a ces nombreux films n’ayant pour simple but que de réunir des célébrités avec leur progéniture comme dans Sam & Kat où se côtoient Dustin Hoffman, Jake Hoffman, Sissy Spacek et sa fille Schuyler Fisk..."

Fun fact, les nepo babies, ce n'est pas un phénomène, encore moins un scoop, mais l'éternelle perduration d'un système qui a toujours fonctionné ainsi : Hollywood, depuis ses prémices.
Des noms légendaires de nepo babies vous viennent forcément à l'esprit. Michael Douglas (Kirk Douglas). Jamie Lee Curtis (Janet Leigh). Charlie Sheen (Martin Sheen). James Brolin (Josh Brolin). Angelina Jolie (Jon Voight). Dakota Johnson (Melanie Griffith).
Parmi ces patronymes, des interprètes reconnus voire couronnés, dont le talent n'est pas contesté, et le statut de nepo baby, pour certains, oublié. Alors que les nouvelles générations d'héritiers connaîtront davantage les reproches émis à leur encontre : manque de mérite supposé, castings réussis grâce au carnet d'adresse, contestation d'un talent que le privilège remettrait spontanément en question.

Comment expliquer cette soudaine prise de conscience du népotisme ?
Rien de plus simple : par le lien très étroit qui unit ces célébrités à la génération Z. Entre séries à succès (comme Euphoria), albums boostés sur des plateformes comme Spotify et TikTok, looks devenus viraux lors des Fashion Week, tendances diverses sur les réseaux sociaux, des personnalités comme Jaden Smith, Zoe Kravitz, Maude Apatow, paraissent tout simplement parler au même public, naturellement hyperconnecté.


La réalité des nepo babies est principalement remise en lumière via la viralité limpide des réseaux sociaux, plateformes de communication où s'expriment abondamment les personnes concernées. Surtout les nouvelles générations, partageant volontiers des selfies en compagnie de leurs parents illustres. Parents bien moins connus aux yeux de leur jeune audience...

Cela s'envisage de manière "cocasse" avec des exemples comme Maude Apatow, superstar de la série trash Euphoria, ayant surpassé en notoriété auprès d'un certain public son père, qui fut pourtant roi de la comédie à Hollywood il y a 20 ans, ou bien avec Francesca Scorsese, qui inonde TikTok de vidéos drôlatiques en compagnie d'un certain Martin Scorsese, son papa, l'érigeant en "meme" sur les internets.
Mais tout le monde ne prend pas ça à la rigolade.
Patrick Schwarzenegger (vous ne devinerez jamais l'identité de son père) déplore par exemple les piques dont il fait l'objet, malgré sa partition dans The White Lotus : "Certains diront que j'ai obtenu ce rôle grâce à mon père. Ils ne voient pas que j'ai suivi dix ans de cours de théâtre, que je monte des pièces de théâtre chaque semaine, que j'ai travaillé sur mes personnages pendant des heures, ni les centaines d'auditions refusées auxquelles j'ai participé. Bien sûr, c'est frustrant, on peut se sentir enfermé et se dire à ce moment-là : « J'aimerais ne pas avoir mon nom de famille. » Mais ce n'est qu'un bref instant"
"Je comprends que ça doit être un peu agaçant pour Patrick Schwarzenegger d'entendre certaines personnes dire qu'il est devenu acteur grâce à son père. Mais d'un autre côté… qui s'en soucie ? Vous avez tous les atouts de la vie et vous réussissez dans ce que vous voulez faire, et votre ego est si fragile que vous ne pouvez même pas reconnaître l'aide évidente que vous avez reçue ?", a sans tarder taclé en retour le Guardian. CQFD ?