C'est un budget "genré" qui sera mis en place le 25 mars prochain à Lyon. Dirigée par le maire écologiste Grégory Doucet, la ville compte mettre l'égalité femmes-hommes au coeur de sa gestion des dépenses. C'est-à-dire ? S'assurer des quotas de femmes à des postes à haute responsabilité, de la diversité des activités proposées dans la ville (sportives notamment), ou encore "imaginer des cours de récréations qui fassent plaisir à tout le monde".
Repenser la gestion d'une ville en fonction des fréquentations des espaces et de leur inclusivité, c'est là l'objectif premier de ce "budget genré" promu par la municipalité lyonnaise. Un concept qui ne date pas d'hier puisque comme nous le rappelle l'Obs, l'Australie puis le Royaume-Uni l'expérimentaient déjà en plein milieu des années 80. De l'Islande au Japon, nombreux furent les pays à se lancer dans ce concept économique et politique.
"Il s'agit d'évaluer toutes les lignes budgétaires de la ville pour voir si elles bénéficient autant aux femmes qu'aux hommes. Historiquement, la ville a été construite par des hommes, pour des hommes. L'idée est donc de réaménager ces espaces pour favoriser un accès égal à tous les habitants, faire en sorte que les femmes se tournent vers ces installations et s'y sentent à l'aise", explique l'adjointe en charge des droits et des égalités Florence Delaunay au Parisien, évoquant notamment le caractère trop peu égalitaire des salles de sport.
"Il s'agit d'une évaluation des éventuels déséquilibres femmes/hommes. Ceux que ça offusque doivent préférer faire l'autruche", épingle en retour l'écologiste Audrey Hénocque, adjointe au maire de Lyon en charge des finances et de la commande publique. Cette dernière détaille justement à LCI le fonctionnement minutieux de la manoeuvre : "Nous regarderons d'abord quelles dépenses sont neutres, par exemple l'entretien de la mairie, faisant en sorte qu'elles soient le moins nombreuses possibles. Nous regarderons ensuite quelles dépenses sont faites pour rétablir l'égalité femmes-hommes. Enfin, le reste du budget est censé être 'genrable', donc il faudra analyser si les usagers de l'équipement ou du service sont plutôt des hommes ou des femmes", développe l'experte.
Passé ce diagnostic détaillé de la situation financière, viendront enfin les rééquilibrages qui font du budget un budget "genré", et donc sensible à l'égalité des sexes. Cet approfondissement prendra des formes concrètes : aider davantage les équipes locales de sport féminin par exemple. En ce sens, l'idée de ce budget est aussi de corriger des failles budgétaires inégalitaires qui ont pu être observées - et volontiers fustigées - par le passé.
"Comme pour toutes les discriminations, tant que nous n'en avons pas conscience, nous ne nous en rendons pas compte. L'urbanisme a beaucoup été pensé par des hommes. Il faut prendre conscience que l'action publique n'est pas neutre et qu'il y a des déséquilibres. Ce n'est pas comme si nous sortions une nouvelle enveloppe, un budget pour les femmes", poursuit Audrey Hénocque, présentant cette initiative ambitieuse comme une manière de vérifier que "des inégalités dans l'action municipale ne sont pas créées, afin d'orienter les futures dépenses".
"Il s'agit d'un mode d'évaluation de la dépense publique : bénéficie-t-elle plutôt aux hommes ou aux femmes ?", s'interroge enfin l'adjointe en charge des finances. Une question des plus sensibles, même en 2021.