Le XXème siècle et sa révolution féministe promettait l'épanouissement progressif de la femme. Pourtant vivre pleinement sa vie de femme demeure toujours extrêmement complexe au XXIème siècle. Vouloir tout réussir dans sa vie est une des ambitions les plus difficiles, encore aujourd'hui, dans nos pays développés.
Ne parlons évidemment pas des pays en développement où là, les femmes n'ont souvent pas leur mot à dire alors qu'elles portent en elles l'espoir. Il n'est qu'à noter le travail remarquable de restauration d'un Etat de droit d'une Ellen Johnson Sirleaf au Liberia ou de ces pionnières de l'environnement comme Wangari Matthai qui oeuvrent, depuis les années 70, contre la désertification en Afrique.
L'actualité nous apporte, certes, quelques notes optimistes comme l'élection récente de Laura Chinchilla à la tête du Costa Rica mais il reste encore beaucoup à faire pour que l'égalité de fait s'accompagne pleinement de l'égalité de droit.
En effet, l'émergence de ces femmes leaders politiques ne signifie pas pour autant que les sociétés contemporaines comprennent mieux l'aspiration des femmes à exercer leur plein rôle.
Accepter la carrière d'une femme est une chose, consentir à ce qu'elle s'immisce parfois dans la vie quotidienne comme c'est souvent le cas pour les hommes, en est une autre. Toute femme doit alors gérer sa carrière avec une habilité de maître pour ne pas mettre en danger l'équilibre familial. Tel est le prix à payer de
cette liberté si longtemps rêvée.
On ne s'étonnera donc pas de trouver surtout dans les grandes capitales du monde, ces jeunes femmes, surdiplômées, ambitieuses mais malheureuses de ne pas rencontrer celui qui donnerait peut-être un autre sens à leur vie. On les dit trop difficiles, trop guerrières mais elles ont souvent baissé les armes à force de ne pas se sentir comprises.
Elles ne rêvent pas du "Prince charmant" comme certains aiment à l'écrire mais plutôt de rencontrer cet homme du XXIème siècle, bien dans sa peau, qui ne se sentira pas menacé à la moindre anicroche.
Il est en effet choquant d'entendre certaines jeunes femmes vous dire que le prix à payer de leur réussite est parfois celui de la solitude. Les grandes villes regorgent de ces "féminins estropiés", de ces femmes qui à force de courir toutes seules dans leur vie, en viennent à se demander si tout compte fait, tout cela valait bien la peine.
Etre une femme du XXIème siècle, c'est donc savoir jouer ce jeu subtil de la composition. Composer pour mieux durer, cela sonne comme une méthode de conquête électorale mais c'est pourtant bien de cela qu'il s'agit.
Socrate nous enseigne qu'il faut "se connaître soi-même" pour être au monde car l'ignorance ou l'aveuglement de soi-même nous rend esclave de nos opinions et nous prive de liberté. Or, les femmes ne se connaitraient-elles pas trop aujourd'hui? Ne seraient-elles pas les victimes de leurs propres conquêtes?
Une phrase terrible à écrire mais qui semble pourtant sauter aux yeux tant elles sont parfois les ennemis à abattre dans certains pays.
Pourtant, elles ne cessent de résister à l'emprise, de s'adapter aux pires situations de la vie quotidienne avec une dignité absolue, parfois au péril de leurs vies.
Il n'est qu'à voir ces haïtiennes, ces iraniennes ou encore ces femmes afghanes qui ne cessent de se battre pour leurs enfants, avec l'espoir de leur offrir un jour un monde meilleur. Cette utopie qui soude les femmes du monde entier est révélée dans une récente étude du Boston Consulting Group intitulée "Women Want More" (Les Femmes veulent plus).
En effet, aujourd'hui plus que jamais, les femmes s'engagent et montrent ainsi que réussir leur vie, c'est aussi améliorer le monde qui les entoure. Pour illustrer ce propos, voici en quelques mots, l'histoire de Zainab Salbi.
Cette jeune femme irakiennefut envoyée aux Etats-Unis et mariée à un homme qu'elle ne connaissait pas pour échapper aux tentatives de séduction de Saddam Hussein. Elle ne savait pas ce qui l'attendait. Violée à répétition et séquestrée par son mari, elle vit s'ajouter au traumatisme de l'exil, celui de la négation de son intégrité de femme. Pourtant, elle fit preuve d'une résilience extraordinaire.
Après un parcours de reconquête de son "humanité" que l'on découvre dans ses Mémoires ("Between two worlds: Escape from Tyranny: Growing up in the Shadow of Saddam"), elle fonda en 1993, à l'âge de 23 ans, Women for Women International.
Cette ONG aide sur le terrain, des femmes victimes des guerres en Afghanistan, en Bosnie, au Kosovo, en Irak ou encore au Rwanda à se reconstruire, en leur offrant un programme éducatif. Elle leur permet, non seulement à terme, de participer aux décisions de la communauté mais aussi de pouvoir être autonomes financièrement. Un début de liberté pour ces femmes qui ont vu leurs existences bafouées par les ravages de la guerre.
Pour Zainab Salbi, réussir sa vie, c'est aider ces femmes au quotidien à retrouver leur dignité afin d'en faire des êtres forts capables de construire des nations solides et donc apaisées. Il y a bien sûr d'autres Zainab Salbi dans le monde, d'autres femmes qui par leurs engagements ont trouvé un sens à leur vie et fait de leur utopie, une réalité. Elles doivent être des modèles pour cette Femme du XXIème siècle en devenir.
En effet, elles sont la preuve vivante que nous sommes les seules à pouvoir façonner notre propre destin et nous montrent qu'une vie réussie, c'est aussi une vie d'engagement.
Veronique Forge