La paresse et moi, on se connaît bien. On regarde des séries ensemble, on repousse le temps d'aller au bureau ensemble, on prend de longs bains ensemble et on mange des toasts à l'avocat par flemme de cuisiner ensemble. On passe du bon temps, en somme.
Pas besoin de justifier mon envie de rien faire, la paresse me comprend tout de suite et sait combien j'ai besoin de ces moments dénués de mouvement. Elle me convainc même parfois d'annuler des rendez-vous pris longtemps à l'avance pour me garder un peu plus dans son cocon chaleureux et réconfortant. Et j'avoue que ça ne me déplaît pas. En même temps, qui préférerait dire non à une couette, Netflix et un petit plat chaud pour affronter le froid, aussi festif soit le plan qu'on a transformé en lapin ? Pas moi, vous l'aurez compris.
Il y a même un nouveau genre de vêtements qui lui est entièrement dédié : le loungewear. Littéralement : des habits pour paresser. C'est dire l'influence du mode de vie sur notre génération.
Mais si les millennials ont relancé l'engouement collectif pour la paresse, beaucoup restent sceptiques. On l'associe trop souvent à un défaut, on parle même quelques fois avec dédains de ceux qui la pratiquent comme un art. A tort, puisqu'elle serait l'anti-chambre de la productivité si on l'utilise à bon escient. S'accorder un instant de paresse aurait ainsi bien des avantages, dont j'ai d'ailleurs fait la liste, dans l'espoir de vous convertir à mon club prestigieux.
Dans un monde largement digitalisé, pouvoir se débrancher de temps en temps reste un luxe essentiel. Quelques fois, j'ose même mettre mon téléphone de côté pendant deux heures, et croyez-le ou non : c'est dur. Si glander sur Instagram fait clairement partie de ma vision de la paresse, je dois admettre que cette dernière est quand même beaucoup plus bénéfique quand je ne passe pas mon temps à stalker des influenceuses.
Apparemment, c'est en prenant le temps de rien faire que le cerveau humain y voit plus clair. D'après une étude, on réussirait même à penser sept fois plus à des plans sur le long terme quand on se perd dans nos pensées que quand on est concentré. De quoi me faire réfléchir sérieusement à mon programme de ce soir - et décider d'opter pour le néant le plus total.
Le repos, le vrai repos, permet d'être d'attaque pour une journée intensive. Il n'y a donc pas de quoi culpabiliser quand on passe son dimanche à zoner, puisque c'est pour la bonne cause. La meilleure façon de paresser en prévention d'une grosse réunion ou d'un projet à présenter, c'est de laisser son esprit vagabonder lors d'une activité qui ne demande pas beaucoup d'effort : du dessin, de la marche ou, pour ma part, l'engloutissement d'un gâteau au chocolat accompagné de glace à la vanille. Paresse + gourmandise = septième ciel.
Car ce n'est pas en ayant la tête dans le guidon qu'on tombera sur le concept du siècle. Chris Bailey, auteur de Hyperfocus: How to Be More Productive in a World of Distraction (ed. Penguin), explique d'ailleurs au Time que "nos idées les plus folles et les plus pointues prennent forme lorsque l'on est déconcentré". Les laisser nous échapper pour prendre du recul, en gros, et les rendre plus pertinentes. Un peu comme quand on dit que la nuit porte conseille, la paresse fait éclore les idées.
Oui parce qu'il s'agirait d'être honnête deux minutes. Paresser rime principalement avec "se faire un bien fou". Physique et psychologique. J'en profite pour ne m'attarder que sur les choses qui me plaisent et m'intéressent, et requièrent l'attention d'un enfant de 3 ans environ. Je prends soin de moi et je laisse même mon autre en faire autant. C'est d'ailleurs encore meilleur quand, grâce à lui, je n'ai pas besoin de quitter le canapé pour attraper la télécommande ou me servir un verre d'eau.
En résumé, et n'en déplaise au président de la République : je suis fainéante, certes, mais productive, surtout.