Philippe Vignal : On signale ce genre d’accidents depuis dix ans. Une association de victimes d’embolie pulmonaire s’est même créée en 2009, l’AVEP, qui désigne explicitement la pilule comme responsable. Nous nous trouvons dans une situation très compliquée qui tient à la particularité de la pilule en tant que médicament. En effet, tout comme les anti-diabétiques, comme le Médiator par exemple, la pilule se prend sur une très longue durée et quotidiennement. Tout médicament induit des effets secondaires, mais pour ceux-ci, ils sont proportionnels à la fréquence de la prise.
P. V. : Les pilules dites de troisième et de quatrième génération font partie des pilules combinées, c’est-à-dire qu’elles associent des oestrogènes et un progestatif. Leur particularité réside dans le progestatif utilisé. Dans les pilules de première et de deuxième génération, le progestatif était le même (lévo-norgestrel), puis les laboratoires ont cherché à concevoir des pilules avec moins d’oestrogènes (d’où l’appellation « minidosées ») et moins d’effets secondaires (acné, prise de poids). Mais en cherchant à diminuer l’exposition aux oestrogènes, on a augmenté les risques thrombo-emboliques, c’est-à-dire la formation de caillots de sang coagulé dans les veines, qui risquent de provoquer des embolies (obstruction d’un vaisseau sanguin). Il faut savoir que les pilules de 2e génération multiplient par 3 les risques de thrombeuse veineuse (phlébite), tandis que les pilules de 3e génération les multiplient par 6.
P. V. : On peut estimer que toutes les pilules combinées sont dangereuses, quelle que soit leur « génération ». En 2005, l’OMS signalait le problème de l’augmentation des risques de cancers du sein induits par l’exposition aux oestrogènes dans les pilules de 1re et de 2e génération. En réalité, c’est l’association des oestrogènes et du progestatif qui crée ces effets pervers ; plus concrètement, ce sont les règles artificielles provoquées par les oestrogènes qui sont responsables des risques thrombo-emboliques. C’est pourquoi je milite ardemment pour la prescription d’une pilule uniquement progestative (Cérazette sur le marché français), qui élimine les règles et de fait tous ses risques associés, puisqu’elle ne contient pas d’oestrogènes. Je ne m’explique pas le silence des autorités de santé et des médias sur l’intérêt de prescrire cette pilule.
P. V. : Mon avis personnel serait de supprimer tout simplement ces pilules. Mais il apparaît judicieux dans un premier temps de repérer les patientes pour qui les pilules de 3e et de 4e génération sont particulièrement contrindiquées. Une femme sur dix présente en effet plus de risques de développer des accidents vasculaires à cause d’une anomalie génétique appelée hypercoagulabilité. Celles-ci doivent absolument préférer les pilules de 1re ou de 2e génération, au mieux elles doivent tenter de passer à la pilule progestative.