Dans Bootyful, Rokhaya Diallo part d'un constat : en termes de représentation des corps féminins, les "normes" changent. Les égéries passent de silhouettes ultra-minces, à l'instar de celles qui défilaient en lingerie lors des shows Victoria's Secret, à des formes plantureuses et des fesses généreuses.
Elle rapporte notamment l'analyse d'Ovidie qui, face caméra, "raconte qu'elle appartient à cette génération qui a connu l'époque où il était honteux d'avoir des grosses fesses", détaille l'autrice de Ne reste pas à ta place ! au micro de Sonia Devillers, dans L'instant M sur France Inter. "Les adolescentes mettaient des pulls autour pour les dissimuler, car leurs postérieurs imposants n'étaient pas considérés comme jolis. Les seuls endroits où les formes plus développées étaient valorisées était les communautés noires, soit africaines, soit afro-américaines ou afro-caribéennes."
Et puis, arrivent les soeurs Kardashian et le corps en 8 de Kim, la cadette et personnalité suivie par plus de 269 millions d'abonné·e·s. Elle impose dans l'industrie de la mode et de la beauté "mainstream" un attrait pour les postérieurs proéminents, jusque-là stigmatisés, mais conserve une taille fine et un ventre plat : de quoi alimenter les pressions sur les jeunes femmes, premières victimes de ces diktats quels qu'ils soient.
Pour nourrir son propos, Rokhaya Diallo interroge nombreuses voix. Certaines, à l'instar de la rappeuse Liza Monet, encensent la façon dont cette révolution rime avec émancipation et réappropriation de son corps et - surtout - de son cul. D'autres, alertent quant à l'hypersexualisation des femmes noires qui en émane, insufflée par le regard masculin, et à la façon dont cela incarne finalement de nouveaux idéaux toujours impossibles à atteindre.
"La psychologue que j'ai interviewée dans le documentaire est justement spécialiste des effets sociaux, de cette pression sur la psychologie de ses patients et de ses patientes", poursuit la journaliste. "Elle explique que dans les milieux lesbiens, dans les milieux où les femmes ne cherchent pas à séduire des hommes, la pression est moindre. Cela montre bien que le regard masculin, le patriarcat et le régime, on va dire dominant hétérosexuel, jouent un rôle, et écrasent d'une certaine manière la volonté parfois des femmes de tout simplement s'imposer."
"Et si c'était un nouvel avatar sexiste ?", questionne finalement Rokhaya Diallo, pointant par ailleurs les opérations chirurgicales auxquelles de nombreuses femmes se prêtent pour y parvenir. Réponse le 19 décembre, sur France TV Slash.