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Six mois dans l’enfer du Pôle Emploi, avec Marion Bergeron
Publié le 7 octobre 2010 à 12:01
Par La rédaction
Chômeuse en fin de droits, Marion Bergeron postule, sans trop y croire, chez Pôle Emploi. Sa candidature retenue, elle plonge, en avril 2009, dans les entrailles du système pour le meilleur et pour le pire. A travers 183 jours dans la barbarie ordinaire, paru chez Plon, elle raconte ses six mois d’enfer, de violence, de misère et d’impuissance…
Six mois dans l’enfer du Pôle Emploi, avec Marion Bergeron Six mois dans l’enfer du Pôle Emploi, avec Marion Bergeron
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Terrafemina : A quel moment avez-vous jugé que votre  expérience méritait un livre ?

Marion Bergeron : Dès la première semaine ! Je racontais tous les jours de nouvelles anecdotes à mon ami et elles nous paraissaient tellement sidérantes… Je devais en laisser une trace ! J’ai donc commencé à raconter chaque soir mes aventures dans un petit carnet. Au bout d’un mois, j’ai été dépassé par la charge de travail. De plus, il m’était de plus en difficile de replonger chaque soir dans l’enfer que j’avais quitté quelques heures auparavant. Du coup, je me suis mise à prendre des notes tout au long de la journée.

TF : Quel est votre pire souvenir ?


M. B. : J’ai d’abord été frappé par la violence, les menaces et injures de certains demandeurs. Il y a notamment eu cet homme qui a tenté de me gifler ou cet autre qui m’a insulté publiquement.
Mais je reste surtout marquée par l’absurdité du système. J’ai l’exemple de ce demandeur qui avait appelé l’agence car il n’arrivait pas à postuler à une offre, l’adresse du recruteur n’étant pas indiquée. Il m’était apparu inenvisageable qu’il rate une opportunité à cause d’une faille du système ! Pendant une demi-heure, j’ai donc passé des dizaines d’appels téléphoniques et de longues minutes sur Internet pour l’aider. Finalement, je me suis aperçu que les seules coordonnées associées à l’offre étaient celles d’un autre centre Pôle Emploi !

TF : Quel est votre meilleur souvenir ?



M. B. : L’homme que j’ai baptisé Monsieur Zaranovitch est sans nul doute  ma plus belle rencontre. Il a la cinquantaine et a vécu autant de vies qu’un chat ! Il possède tout un catalogue de diplômes et d’expériences, parle couramment le russe, le polonais, l’anglais, l’allemand et le français. Ces cinq dernières années, il vivait retiré en Sibérie, sur les rives du lac Baïkal. Pour la passionnée du Transsibérien que je suis, il était un bol d’air dans mon enfer quotidien. Il est très vite devenu mon demandeur chouchou. Je suis d’ailleurs toujours en contact avec lui.

TF : Avec le recul, quel regard portez-vous sur la gestion des demandeurs
d’emplois en France ?



M. B. : C’est un scandale ! Le Pôle Emploi n’est qu’une énorme usine à chiffres. Les conseillers doivent effectuer des tâches absurdes ! Réaliser « x » entretiens personnalisés par mois, rediriger « x » personnes vers des formations : telle est l'unique mission qui leur est donnée. Mais les agences étant en sous-effectifs, le personnel tente de réaliser ces objectifs au détriment de la qualité de l’aide à apporter au public, bien souvent.

Par ailleurs, si le Pôle Emploi n’est d’aucune utilité pour les personnes qualifiées et autonomes, il devrait logiquement pouvoir aider celles qui sont incapables de rédiger une lettre de motivation. Ce n’est même pas le cas !

TF : Quel message souhaitiez-vous faire passer en écrivant ce livre ?



M. B. : Je voulais attirer l’attention de l’opinion sur la souffrance des agents du Pôle Emploi. Ils sont traités avec mépris jour après jour, alors que ce ne sont que les représentants innocents d’un organisme défaillant. Toutefois, ce sont des personnes compétentes et les mieux placées pour résoudre les problèmes des demandeurs d’emplois.

TF : Quels sont vos projets professionnels aujourd’hui ?



M. B. : J’ai pu décrocher un financement Fongecif. Je suis actuellement des cours afin de compléter ma formation de graphisme. Ensuite, je compte créer mon entreprise pour pouvoir choisir les personnes avec lesquelles je souhaite travailler et surtout… prendre du plaisir à me lever chaque matin.



183 jours dans la barbarie ordinaire de Marion Bergeron, Plon.

 

Propos recueillis par Marie-Laure Makouke

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