Plus que la cervelle d'agneau façon thaï, plus que les chips de peau de poisson, plus que la betterave au café, c'est une candidate qui attire l'attention chaque mercredi soir. Cette candidate de Top Chef, c'est Justine Piluso. Depuis le premier épisode de cette onzième édition de l'émission culinaire de M6, la jeune cheffe a clairement créé une dissension au sein des téléspectateurs, qui soit l'adorent soit la détestent.
Les accusés ? Son sourire, son enthousiasme et sa joie de vivre.
Car oui, Justine est heureuse de rencontrer les chefs, Justine s'extasie devant un navet (qui en fait est un radis), Justine est ravie d'être la candidate solitaire, Justine prend chaque compliment comme un cadeau de Noël. Bref, Justine est heureuse d'être là, tout simplement.
"Je déteste les personnalités comme ça", "Justine c'est comme la coriandre, soit tu l'aimes soit tu la détestes", "Possible de débrancher Justine ?", "Elle m'a déjà fatiguée, Justine", "Faut qu'elle arrête, elle est insupportable"... Sur Twitter, les commentaires sur l'attitude de cette candidate, d'abord solitaire puis dans la brigade du nouveau chef Paul Pairet, ne cessent de fuser dans tous les sens, et souvent pas dans le bon.
Si ce dernier la décrit comme un "rayon de soleil", tout le monde n'est pas de cet avis. Et cette cheffe de 27 ans ne laisse personne indifférent.
À tel point que certains y vont de leur propre analyse sur la raison des attaques que subit la candidate. "J'pense que le monde est devenu si sombre qu'on est plus habitué à ce truc qui s'appelle l'enthousiasme". "Qu'est-ce qui nous arrive à être méprisants envers du positif ? On pète les plombs, ça n'a aucun sens", peut-on par exemple lire sur Twitter.
"Qu'a-t-elle que les autres n'ont pas ?", interroge le psychologue clinicien Samuel Dock, contacté par Le HuffPost. Selon lui, faire preuve d'autant d'agressivité envers une personne dont le seul "défaut" est de crever l'écran par sa joie relève "de l'envie plus que de la jalousie".
"Elle réveille peut-être un manque chez certains. Il faut se demander, quand on la critique, si la joie est un objet dont on est dépourvu", explique-t-il. Se poser la question de savoir si cette joyeuseté révèle une menace et pourquoi ressentir "le besoin de détruire l'autre pour ne pas être confronté à ses problèmes".
Si nous laissons Justine de côté un instant, force est de constater que les personnes guillerettes, pétillantes, toujours excitées pour un rien en agacent souvent plus d'un. "Si vous êtes énervé par les personnes enjouées, vous allez aimer cette étude", titrait en 2016 The Cut. L'étude en question, publiée dans la revue Organizational Behavior and Human Decision Processes, montre que la joie excessive de certains individus peut être perçue comme de la naïveté.
Une expérience consistait à donner des conseils biaisés à quelqu'un pour gagner de l'argent. Un peu comme "un vendeur de voitures d'occasion gagnant plus de commissions en persuadant un acheteur de payer trop cher pour une voiture", résume le Washington Post. Résultat des courses: les conseils donnés par les participants étaient plus biaisés face à des personnes très heureuses. Au cours d'une autre expérience, les personnes joyeuses étaient choisies pour négocier car jugées plus simples à exploiter.
Qu'est-ce que cela signifie ? Que les individus très heureux sont perçus comme plus naïfs que les autres, qu'ils se "protègent des informations négatives sur le monde". Ce qui a tendance à agacer...
C'est ce que note également Samuel Dock, pour qui les remarques acerbes envers Justine montrent à quel point elle entre, d'une certaine manière, en "rupture avec une société qui fait la gueule. Puisqu'elle est joyeuse dans un monde qui ne l'est pas, elle doit être remise à sa place", poursuit-il.