The Substance, c'est le film choc de novembre.
En relatant l'expérience pour le moins... Atypique, d'une ex star de cinéma testant une énigmatique "substance" afin de trouver la jeunesse éternelle, la cinéaste Coralie Fargeat signe l'ovni de la rentrée, déjà couronné à Cannes par le prix du Meilleur Scénario - en attendant les Oscars. C'est trash, hyper pop, très crade, c'est complètement fou.
Et exceptionnel : car The Substance marque le grand retour de Demi Moore, le sex symbol absolu des années 90. Dans cette oeuvre irrévérencieuse à voir dès ce 6 novembre, la star de Ghost, Strip tease et A armes égales se donne à fond, corps et âme... Littéralement. Et notamment l'espace de scènes de nu très audacieuses.
Frontales, et particulièrement puissantes.
Cette sortie événement qui a fait le tour des festivals du monde entier présente une Demi Moore comme on ne l'a jamais vue. Très sexualisée dans les années 90 - pour la promo de Strip Tease, on exigeait carrément d'elle qu'elle déambule en sous vêtements sur certains plateaux - l'actrice se met complètement à nu dans The Substance. Mais c'est différent.
Dans une scène, Demi Moore s'apprête à expérimenter la "substance". Totalement dénudée dans sa salle de bains, l'actrice se dévoile en tenue d'Eve à 61 ans, frontalement face à la caméra, et c'est un geste politique : Moore envoie ainsi valdinguer l'âgisme, cette exclusion des actrices une fois le cap de la quarantaine atteint.
L'âgisme est un phénomène de société de plus en plus dénoncé par les stars hollywoodiennes. On a dédié à cette invisibilisation des femmes "âgées" une enquête sur Terrafemina.
Une séquence qui n'a rien de gratuite donc - elle préfigure en outre la redécouverte par le personnage de son corps, ou plutôt, d'un autre corps, celui de Margaret Qualley - et qui fera d'autant plus sens dans un dernier acte... Cinglé.
Mais surtout, cette scène impudique est une réappropriation par Demi Moore de ce physique longtemps scruté par les cinéastes masculins un brin libidineux. Il y a quelque chose de bien plus "pur" et beau dans ces plans saisis par le regard d'une femme cinéaste, dans un film ouvertement féministe. Le corps de Demi Moore n'est pas du tout un argument glamour, exploité : c'est totalement le sujet du film, sa matière-même.
Car oui, cet ovni horrifique est effectivement une réponse constante, outrancière et réjouissante, au male gaze, ce regard masculin, qui sexualise le corps féminin et le plie à ses propres fantasmes libidineux. Coralie Fargeat détourne tous les codes de cette sur-sexualisation en la dédiant au personnage de Margaret Qualley.
Le male gaze, la critique Iris Brey l'analyse pour nous dans cet article.
Coralie Fargeat met en scène Demi Moore afin de dénoncer le culte du corps et de la jeunesse, l'hypocrisie de l'industrie hollywoodienne, la pression de la la chirurgie esthétique, entre autres diktats de beauté aliénants. La réalisatrice s'empare du sous genre horrifique le plus organique (le body horror) afin d'exacerber cette réalité jusqu'à la terreur tétanisante. Le résultat est intense.
C'est ce dont se réjouit d'ailleurs la critique hexagonale depuis Cannes : la journaliste Perrine Quennesson est ressortie traumatisée de ce "Sueurs Froides transposé dans une boucherie qui fait exploser le male gaze". La sur-sexualisation de son corps, très fantasmé par les cinéastes, Demi Moore en parle en détails dans cet article.
Aujourd'hui, c'est plus l'usage de la chirurgie qui génère des remarques, tout à fait déplacées. Dans sa dernière vidéo, "l'expert" en changements physiques des stars Johnny Beteridge nous révèle ainsi les diverses pratiques chirurgicales dont Demi Moore aurait fait l'objet en seulement quatre ans afin de paraître "de plus en plus jeune" : une "analyse" très précise qui nous a inspiré ce billet d'humeur.
Les internautes s'attaquent volontiers à Demi Moore... qui l'était déjà, attaquée, en osant s'afficher en bikini à 40 ans pour "Charlie's Angels". Elle en témoigne dans cet article d'ailleurs.