Pomme sacrée Artiste féminine de l'année, Yseult couronnée Révélation féminine... Malgré l'omniprésence de profils masculins dans la catégorie du Meilleur album (un petit fiasco), cette édition des Victoires de la musique 2021, ce 12 février, fut tout de même riche en triomphes féminins... et féministes. Une cérémonie artistique, oui, mais surtout politique.
Et pas simplement parce que Benjamin Biolay, Artiste masculin de l'année, y a décoché quelques piques au sujet de l'inaction gouvernementale face à un monde de la culture qui se meurt au temps du coronavirus. Non, le simple sacre de la jeune interprète des Failles faisait déjà sens. La veille des Victoires, Pomme avait effectivement apporté sa pierre à l'édifice #MusicToo, l'espace d'une tribune publiée sur Médiapart, en fustigeant le sexisme de l'industrie musicale, évoquant des faits de harcèlement et de manipulation dont elle aurait été victime, adolescente.
"J'écris pour espérer que quelques unes se sentiront moins seules, et pour que les autres réalisent et agissent, devant l'ampleur des violences quotidiennes perpétrées dans nos professions. Parlons-nous pour que la vérité et la justice se fassent entendre", écrivait-elle alors.
Lors de son discours aux Victoires, la jeune chanteuse en a remis une couche : "J'espère que cette industrie sera de plus en plus safe pour les femmes, que cette nouvelle génération saura s'imposer et renverser les codes qui ne sont pas toujours faciles pour elles."
Engagement majeur dans cette cérémonie. Il suffit d'observer la performance impressionnante de la chanteuse Yseult, interprétant Corps, dans une mise en scène à la fois émouvante et puissamment politique. En recevant le prix de la "Révélation féminine", la jeune artiste de 26 ans a délivré un discours tout aussi poignant. "Le chemin est long en tant que femme noire, femme grosse, oubliée de la société et de la culture. Notre colère est légitime, et j'aimerais que ce soir toute la France l'entende. Ce n'est pas une victoire que pour moi, mais aussi pour mes frères et soeurs. On est allés arracher cette place et on la mérite", a-t-elle déclaré face à une audience conquise.
Une performance inclusive au possible et des mots puissants, énoncés quelques mois après le mouvement de manifestations nationales contre les violences policières et les discriminations raciales.
Fort également, la performance électrisante de Suzane. En représentant un couple de lesbiennes qui se déchire, la chanteuse, elle aussi nommée au titre d'"Artiste féminine de l'année", était l'une des grandes figures queer de cette cérémonie, magnifiant les voix LGBTQ, encore trop discrètes au sein de l'industrie musicale hexagonale. "On peut parler de la prestation de Suzane aux Victoires de la musique ? C'était juste sublime, j'ai même pleuré devant", a avoué une internaute subjuguée. Elle n'est pas la seule.