Diane Kurys : Il m'a fait rire quand je l'ai lu. Je connaissais un petit peu l'histoire. Et j'ai trouvé qu'il y avait un formidable prétexte à une comédie non dénuée d'émotion, mais surtout un peu déjantée. Et puis, quand je lui ai proposé de le réaliser, je crois qu'elle a été assez soulagée de ne pas avoir à le faire elle-même. On s'est prises au jeu, et on a écrit toutes les deux assez rapidement un scénario. On s'est énormément amusées parce qu'on se connaît bien, on s'entend bien. On n'est pas pareilles et en même temps, on a des points de ressemblance. Déjà, on vient de Lyon (rires), je réagis bien à son humour, et elle réagit bien au mien, ce qui nous a permis d'écrire un scénario qui fonctionnait. Faire le film a été un énorme plaisir.
D.K. : Oui, j'avais très envie de faire une comédie et j'ai vraiment envie d'en refaire. Je trouve que c'est quelque part plus agréable, on est joyeux toute la journée, on n'a pas besoin de tirer les larmes des acteurs. Et puis, quand les gens sortent de projection avec le sourire, c'est très gratifiant. Lorsque j'ai fait Pour une femme, qui était un film très triste, et que les gens sortaient en larmes, j'avais presque l'impression que je devais m'excuser. Faire rire, c'est agréable. J'aime beaucoup ça !
D.K. : Non ! Nous avons adapté le livre, qui racontait l'histoire d'un frère et d'une soeur producteurs et travaillaient ensemble. Et quand on a fini le scénario, je me suis réveillée un matin en me disant que je ne sentais finalement pas ce couple frère-soeur. Puis j'ai dit à Sylvie : "Et si on faisait un couple de femmes ?". Elle a aimé l'idée, a dit "Allez, on y va !". C'est la merveilleuse liberté de la création. Et je crois qu'on a gagné, qu'on a alors trouvé notre "plus".
D.K. : C'est beaucoup plus facile ! Elles ont beaucoup plus de patience, de tolérance vis-à-vis de la mise en scène, de l'attente, de la recherche. Elles sont beaucoup plus appliquées aussi. Et puis, il n'y pas eu d'ego du tout. C'était vraiment une collaboration. Chacune apportait une idée, on gardait, on jetait. Je suis comme une éponge, dans ces cas-là. C'est toujours agaçant quand les équipes après les tournages disent "Oh, ça a été merveilleux !". Mais là, en l'occurrence, c'est vrai, et je pense que ça se ressent.
D.K. : La France est quand même un pays béni pour les metteurs en scène parce qu'ils ont ce qu'on appelle le " final cut " et donc droit de vie ou de mort sur un film. Après, il arrive que par aveuglement, par lâcheté, on suive un producteur dans la mauvaise direction. Mais, personnellement, je n'en ai jamais rencontré de tels. On a vraiment exagéré le trait. Pour ce qui est d'être une femme réalisatrice, encore une fois, je pense qu'en France il y a en a quand même pas mal, en tous cas bien plus que lorsque j'ai débuté. Après, c'est difficile pour les femmes en général, et pas seulement dans ce métier.
D.K. : J'ai toujours produit mes films depuis Diabolo Menthe, avec Alexandre Arcady . Il a toujours produit les miens, j'ai produit les siens, on a une société de production ensemble. C'était une décision très importante depuis le départ, qu'il m'avait suggérée quand nous visions ensemble, pour que nous gardions notre indépendance et notre liberté. Sur le film, nous n'avons aucune chaîne hertzienne en revanche. Elles ont dit : " un film sur le cinéma, ça ne marchera jamais ! ". Bon, c'était avant Dix pour cent, grâce auquel on a pu voir que les problématiques de notre métier, qui sont très exacerbées, sont souvent universelles et intéressent le public.
D.K. : Oui, comme beaucoup de femmes d'aujourd'hui ! Ca n'est pas inhérent au cinéma mais il se trouve que notre milieu à nous est particulièrement comique. On est dans une telle pression financière, temporelle, que tout devient capital.
D.K. : Je crois que le public va comprendre. On lui pardonne parce que, comme dans une histoire d'amour, elle est aveuglée. Quand on est aveuglément amoureux, ça n'est qu'à la fin de l'histoire qu'on se rend compte que les autres avaient raison et qu'on n'aurait pas dû y aller. N'importe qui ayant vécu la passion au boulot ou dans sa vie perso peut comprendre qu'à des moments, on n'est plus là pour personne. Depuis le début jusqu'à la fin du film, cette femme est sous pression. On se demande à quel moment elle va exploser.
D.K. : Fred Testot est particulièrement merveilleux. Mais pour vivre avec une actrice, il faut être un peu comme ça. Sinon c'est infernal. Les actrices sont toujours sur un tournage. Donc il faut être un peu solide, surtout si on a des enfants, pour partager le quotidien quand il y en a avec une femme qui a ce métier-là. Alors non, je n'ai pas voulu charger ce personnage.
D.K. : Non, je laisse ça, justement, à mon fils. Tant que je suis capable de faire des films, je continue. Et puis, ça me semble paradoxalement plus facile. Alors, tant que je suis capable de soulever ces montagnes-là, c'est plus dans mon tempérament. Quand je serai très vieille, fatiguée, et que je ne pourrai plus vraiment marcher, peut-être que j'écrirai !
D.K. : Oui, j'ai envie de faire un film qu'il a écrit avec un coscénariste, et qui est l'histoire d'une mère et son fils. C'est aussi une comédie, et elle s'appelle "Loufoque" !
*C'est le métier qui rentre, de Sylvie Testud, aux éditions Fayard