Carrie, Charlotte, Samantha et Miranda ont fait partie de la vie de plusieurs générations de filles et de femmes. Dans Sex and the City, diffusée entre 1998 et 2004 à la télévision, les quatre copines parlaient d'amour, d'amitié, mais aussi et surtout de sexe. Et si certaines scènes sont assurément stéréotypées lorsqu'on les regarde en 2019, reste que la série créée par Darren Star a été un tournant pour la représentation de la sexualité féminine à l'écran.
Dès l'épisode pilote de Sex and the City sur HBO - sur Téva puis M6 en France – Darren Star donnait le ton. On se souvient notamment de ce passage qui se déroule dans un restaurant huppé où Miranda (Cynthia Nixon) se met à mimer bruyamment une scène de sexe torride contre un grillage tirée du film The Last Seduction. A l'époque, les critiques n'avaient pas toutes été tendres avec la série.
"Pour les nouveaux arrivants, soyez prévenus que Sex and the City n'est pas faite pour tout le monde, avec ses sujets tabous et ses dialogues sexuels crus", écrivait notamment Earl Cressey dans DVD Talk. "A l'époque, faire Sex and the City c'était risqué c'est sûr", se souvient le réalisateur Darren Star pour Le HuffPost lors du Marché international du film de communication (Mipcom).
"La télévision était aseptisée et d'une certaine façon censurée. Mais je tenais à faire une série sur le sexe et les relations amoureuses d'un point de vue narratif adulte", raconte le réalisateur à quoi l'ont doit aussi 90210: Beverly Hills et Melrose Place. Fort des succès populaires de ces séries, Darren Star voyait en Sex and the City "l'équivalent d'un film indépendant à la télévision". "Je pensais faire quelque chose de subversif que j'avais envie de voir, mais jamais je n'avais imaginé que ça pourrait devenir grand public", ajoute-t-il.
Avec ses quatre personnages principaux incarnant quatre profils différents de femmes, Sex and the City évoque sans complexe la masturbation féminine, la fellation, la sodomie, mais aussi le mariage comme cela n'a jamais été fait à la télévision avant. "Plein de femmes ont réalisé que non, elles ne sont pas anormales, que c'est OK d'avoir tel ou tel fantasme, que les femmes sont comme ça, parlent comme ça, ont ces problèmes-là, que comme Charlotte elles peuvent se demander: si elle accepte de pratiquer la sodomie, est-ce que son compagnon voudra toujours l'épouser ?", analyse la sociologue Céline Morin à Slate.
L'idée de Darren Star était simplement de raconter des histoires de femmes "normales" inspirées de conversations que pouvaient avoir ses amies trentenaires à l'époque. S'il estime "qu'un homme peut tout à fait créer des personnages féminins", il a aussi fait appel à de nombreuses femmes scénaristes pour écrire les épisodes de Sex and the City où elles évoquaient avec humour leurs propres expériences.
Regarder Sex and the City en 2019 peut pourtant être déconcertant. De nombreux articles ont pointé du doigt les stéréotypes relayés par la série. La plupart des personnages mis en scène sont Blancs et hétéros, à l'exception de rôles caricaturaux comme l'ami de Carrie, Stanford Blatch ou le wedding planner de Charlotte, Anthony Marantino. Dans un épisode intitulé Boy, Girl, Boy, Girl, le personnage de Sarah Jessica Parker assure que "la bisexualité n'existe pas. C'est juste une escale sur la route vers l'homosexualité." Quant à Samantha (Kim Catrall) elle est régulièrement "slut-shammée" par ses copines pour ses pratiques sexuelles trop dévergondées à leur goût.