"UNE MINUTE DE SILENCE POUR ELLES !". C'est tout en majuscules que l'activiste Femen et féministe Sofia Antoine nous incite, depuis le quinze août dernier, à réagir aux violences dont de trop nombreuses femmes sont encore victimes en France. Et plus encore, aux très (trop) nombreux cas de féminicides. Une démarche nécessaire. Car une minute de silence est toujours un autre moyen de libérer la parole. Et de se référer à ces victimes "que l'on n'a pas entendues", précise l'internaute, tuées sous les coups de leurs conjoints malgré leurs protestations auprès de la police, le dépôt d'une plainte ou autre mesures judiciaires.
"Chers-es tous-tes, Je vous invite à prendre une minute de silence pour toutes les victimes de feminicides. Puisque nos cris ne sont pas entendus, imposons un silence assourdissant au gouvernement", développe la militante sur son compte Twitter, appelant également au partage de nombreux médias, comme Libération, Causette et Brut. Un appel qui a fait réagir. La vidéo initiale de celle qui se dit "obsédée" par "l'égalité et l'équité" a effectivement été retweetée et likée des centaines de fois sur la Toile.
#UneMinuteDeSilencePourElles, #JeSuisFeminicidophobe, #ProtegezLes, #PasUneDePlus, #STOPfeminicides. D'Instagram à Twitter, entre publications et stories, les hashtags pullulent comme autant de cris de ralliement depuis quelques jours. Au fil des vidéos d'anonymes mutiques, s'affichent des expressions, solennelles et graves, celles d'individus de tout genre et de tout âge. Parfois, ceux et celles qui fixent l'objectif brandissent des écriteaux sur lesquels l'on peut lire "Etat d'urgence : 92ème féminicide", "STOP", ou encore "91 silences". Certaines personnalités, comme la vidéaste et chanteuse Juliette Katz (alias Coucou les Girls) participent au mouvement.
"Chaque fois que je fais le décompte, j'ai peur de ne plus être à jour", déplore une internaute. Et on la comprend. Car ce 19 août encore, un automobiliste a été arrêté par la police, près d'Annecy. Dans une valise placée à l'intérieur du coffre de sa voiture, l'on a retrouvé le cadavre de son épouse. Comme l'indique Le Parisien, il s'agit du 93ème féminicide depuis le début de l'année. L'indignation n'est donc pas prête de cesser. Le collectif "Féminicides par compagnons ou ex" recense d'ailleurs ces drames sur les réseaux sociaux, en consacrant une publication à chaque victime. Sur Facebook, ses membres tirent la sonnette d'alarme et fustigent le traitement médiatique parfois hasardeux de ces drames : "Non, ce ne sont pas des 'drames familiaux' ni des 'drames de la séparation' ni des 'crimes passionnels', ce sont des féminicides conjugaux perpétrés par des hommes frustrés qui pensent détenir un permis de tuer", lit-on.
"Ce sont des assassinats systémiques dont l'origine se trouve au coeur de notre société, dans l'éducation patriarcale qui est donnée aux hommes et qui les autorise à posséder femmes et enfants, à disposer de leurs vies", poursuit le collectif, évoquant la notion de "terrorisme patriarcal". Sofia Antoine s'engage quant à elle à mettre en ligne sa minute de silence à chaque nouveau féminicide. "À chaque vidéo je m'aperçois que je suis bouleversée par la détermination de vos visages, le cri de colère tacite qui se lit sur vos traits, vos regards qui m'interpellent. Toutes ces vidéos en réalité, hurlent... En vous regardant tous-tes je me dis que le cri est parfois plus distinct dans une posture symbolique ou un acte fort. Je suis très émue de voir une telle mobilisation", écrit-elle sur Instagram. Une émotion largement partagée.