"Avant de devenir l'une des légendes de la pop les plus importantes et les plus influentes du monde, Britney Spears vivait dans une petite ville du sud des Etats-Unis du nom de Kentwood, en Louisiane". C'est par cette jolie introduction très factuelle (et pas totalement objective non plus) que débute une pétition pour le moins insolite. Déjà signé par plus de 49 000 fans en une poignée de jours, le texte en question a pour nom : "Remplaçons les statues confédérées en Nouvelle-Orléans par celle de Britney Spears, cette héroïne de la Louisiane".
Tout est dans le titre. L'idée citoyenne de l'instigatrice de ce projet, Kassie Thibodeaux, est tout bonnement de déboulonner des monuments historiques datant de la guerre de Sécession, et par-là même de l'époque de la traite négrière. Rappelons que durant la seconde moitié du dix-neuvième siècle, les États confédérés du Sud des Etats-Unis (ou "Sudistes" pour les connaisseurs), comme la Louisiane donc, mais également l'Alabama, le Texas ou encore le Tennessee, étaient en faveur de l'esclavage. Le président Abraham Lincoln s'y opposait quant à lui formellement, et il faudra attendre l'année 1865 pour que son abolition soit enfin actée.
A ce passé qui ne passe pas (mais perdure cependant sous la forme de ces statues), Kassie Thibodeaux préfère donc un emblème plus contemporain - et plus féminin. Mais pourquoi opter pour l'interprète de Toxic ? Car, par-delà sa ville d'origine et sa notoriété, nous dit-elle, Britney Spears aurait prouvé sa force de caractère "en surmontant non seulement une dépression très médiatisée, mais en travaillant continuellement pour s'améliorer".
Bref, la chanteuse serait une source d'inspiration positive pour des millions d'anonymes, bien plus que ces statues à la teneur pro-esclavagiste et foncièrement raciste. Une assertion qui fait sensation sur les réseaux sociaux.
Bien évidemment, la mise à l'honneur de Britney Spears ne se limite pas à son côté "girl power", à la lutte très "tabloïdisée" que fut sa vie et sa carrière ou encore au bagou indémodable d'un "One more time". Non, l'instigatrice de la pétition insiste aussi sur son altruisme caritatif.
En 2006, la Britney Spears Foundation aurait effectivement attribué près de 585 000 $ aux programmes de secours lancés suite aux ravages considérables de l'ouragan Katrina dans le pays. Dix ans plus tard, l'artiste aurait assuré une autre collecte de fonds considérable, équivalant à 250 000 dollars, à destination de la Croix-Rouge, afin de répondre aux catastrophiques inondations ayant notamment touché les écoles du coin.
Preuve en est que la mondialement célébrée Britney n'a jamais vraiment oublié ses terres natales. "Britney Spears a déjà gagné son étoile sur le Walk of Fame d'Hollywood, et il est grand temps que son pays d'origine l'honore comme elle le mérite", s'enthousiasme encore Kassie Thibodeaux, achevant sa tribune d'un pressant "Do the right thing !" ("Faites ce qu'il faut"). Comme un écho au film éponyme du cinéaste afroaméricain Spike Lee. Reste cependant à savoir si tous ces arguments sauront convaincre le gouverneur de Louisiane John Edwards.
Mais ne vos méprenez pas : derrière le vernis people et pop, c'est un vrai enjeu de société que soulève cette drôle de pétition. Faut-il abattre les monuments imprégnés d'idéologie raciste qui ponctuent les Etats-Unis ? Bien des citoyens s'interrogent aujourd'hui, alors que les foules se mobilisent au gré des rues contre l'oppression raciale. Taylor Swift, elle, ne se pose plus la question. "Cela me rend malade qu'il y ait des monuments dans notre Etat qui célèbrent des personnages historiques racistes", tacle la chanteuse native du Tennessee.
Si pour l'artiste "abattre des statues ne va pas réparer les siècles d'oppression systémique, de violence et de haine que les Noirs ont dû endurer", il serait tout de même bon de mettre fin à cette célébration "de personnages méprisables" qui ne méritent pas une telle gloire. Comme Edward Carmack et Nathan Bedford Forrest par exemple, figures pro-esclavagistes du Sud des Etats-Unis. Ce message, l'interprète de "Lover" l'adresse directement à la Commission du Capitol et à la Commission historique du Tennessee, dans l'espoir d'un changement. A bon entendeur.