Le travail de nuit peut non seulement avoir des conséquences non négligeables sur les systèmes cardiovasculaires et digestifs, accélérer le vieillissement de nos capacités cognitives et influer négativement sur la fertilité des femmes. Mais il peut aussi accroître dangereusement le risque de développer un cancer lorsque l'on est une femme.
C'est ce que met en lumière l'analyse de 61 études parue lundi 8 décembre dans Cancer Epidemiology Biomarkers and Prevention, la revue de l'American Association for Cancer Research. Au total, ce sont plus de 3,9 millions de participants résidant en Amérique du Nord, en Europe, en Australie et en Asie qui ont été suivis, couvrant 114 628 cas de cancer. En regroupant et recoupant ainsi les données, les chercheurs ont tenté de déterminer si le travail de nuit pendant plusieurs années pouvait accroître le risque de développer onze types de cancer quand on est une femme. Une autre analyse a particulièrement analysé les risques de développer six types de cancer chez les infirmières de nuit.
Les résultats de l'analyse sont révélateurs : les femmes travaillant de nuit pendant plusieurs années ont 19% de risque supplémentaire de développer un cancer. Elles sont notamment plus sujettes au cancer de la peau (41% de risque supplémentaire), au cancer du sein (32%) et au cancer gastro-intestinal (18%) par rapport aux femmes n'ayant pas effectué de travail de nuit de façon durable.
Selon l'autre étude citée, les infirmières sont particulièrement vulnérables au cancer du sein (58% de risque supplémentaire, ainsi que le cancer gastro-intestinal (35%) et du poumon (28%). Comment l'expliquer ? Pour les chercheurs, les conditions difficiles et intenses du travail de nuit sont clairement incriminées. Mais ils avancent également que les connaissances médicales des infirmières et le fait qu'elles se soumettent régulièrement à des examens médicaux permet de mieux détecter les cancers.
Les chercheurs ont également noté que l'accroissement du cancer du sein n'a été constaté que chez les femmes travaillant de nuit en Amérique du Nord et en Europe. Cela pourrait indiquer, expliquent-ils, des taux d'hormones sexuelles plus élevés, ce qi accroît le risque de développer un cancer du sein.
Enfin, les scientifiques ont déterminé que le travail nocturne augmente le risque de cancer du sein de 3,3% par tranche de cinq ans dans une équipe de nuit. "Les résultats de cette étude suggèrent la nécessité de programmes de protection de la santé des femmes travaillant de nuit, avec des examens médicaux réguliers", estiment les chercheurs. À l'heure actuelle, les travailleurs de nuit en France doivent bénéficier d'un suivi individuel régulier de leur état de santé par la médecine du travail afin d'apprécier "les conséquences éventuelles du travail de nuit pour sa santé et sa sécurité, notamment du fait des modifications des rythmes chronobiologiques, et d'en appréhender les répercussions potentielles sur sa vie sociale", précise le site du ministère du Travail.