Lorsqu'il a inventé son stick Mensez, Daniel Dopps s'attendait sûrement à ce que les femmes se jettent à ses pieds et le remercient, lui qui a ENFIN trouvé comment mettre fin à ce calvaire du flux menstruel (alors qu'elles, pauvres ignares, elles ont été infichues de trouver la réponse en des siècles d'existence).
Eh bien non. Daniel Dopps s'est plutôt pris une salve de remarques acerbes et moqueuses, et il l'a plutôt bien cherché. Et pour cause : ce chiropracteur originaire de Wichita, Kansas, a déposé un brevet pour Mensez, un "lipstick" censé coller entre elles les petites lèvres de la vulve pour empêcher le sang des règles de s'écouler. "Il s'agit d'une nouvelle approche naturelle de l'hygiène féminine. Appliqué sur les petites lèvres, le stick Mensez crée un sceau qui résiste au sang et à la transpiration mais qui se défait instantanément avec l'urine, retenant les fluides menstruels du vagin jusqu'à ce que la personne urine", explique très sérieusement Daniel Dopps sur sa page LinkedIn. Et d'ajouter : "Lorsqu'elle urine, le sceau se défait et permet à l'urine ainsi qu'aux fluides menstruels d'être évacués dans les toilettes. Il faut y penser comme un apprentissage des règles, plus sain, plus sûr et plus propre, car comportant moins de risques d'infection."
Moins de risques d'infection, ça reste à prouver. Surtout, note Forbes, Daniel Dopps ne semble avoir qu'une connaissance très relative de l'anatomie féminine. En effet, notre spécialiste ès menstruations confond manifestement vagin (d'où s'écoule le sang des règles) et l'urètre (d'où sort l'urine). Ce qui ne l'empêche pas d'affirmer que son tube de colle pour les petites lèvres est "plus logique que d'introduire [dans le vagin] un bouchon". "Comme pour les tampons, nous bouchons l'accès à la vessie", affirme-t-il à Forbes. Heu, en fait non : les tampons ne bouchent aucunement l'accès à la vessie puisque celle-ci ne se situe pas dans le vagin, là d'où s'écoule le sang. Daniel Dopps aurait peut-être dû ouvrir un manuel sur le corps humain avant de sortir pareilles inepties.
Mais le pire dans cette histoire de glue anti-règles, ce n'est pas l'idiotie du concept : c'est le sexisme de son créateur. Accusé – à raison – sur Facebook de sexisme pour avoir inventé une "lipstick" qui enseigne aux femmes à avoir honte de leurs règles, Daniel Dopp n'a rien trouvé de mieux que de se défendre en répliquant : "Oui, je suis un homme et vous en tant que femme, vous auriez dû trouver de meilleures solutions que les couches et les bouchons. Mais vous ne l'avez pas fait. La raison pour laquelle les femmes se montrent distraites 25% du temps est leurs règles, qui les rendent moins productives qu'elles ne devraient l'être. Les femmes ont tendance à être beaucoup plus créatives que les hommes, mais leurs règles étouffent [leur créativité] et embrouillent leur esprit." Wow, heureusement que tu étais là, Daniel. Qu'aurait-on fait sans lui ?
Et quand Forbes en rajoute une couche en l'accusant de misogynie, l'inventeur de l'année n'a pas d'autre réponse que : "Je ne suis pas sexiste, ma réceptionniste est lesbienne."
Face à la polémique qu'il a déclenchée, Daniel Dopps a fini par déclarer que son concept avait été "mal compris" et qu'il apportait "de larges implications sociales pour les femmes". Tout à fait : la stigmatisation des femmes qui ont leur règles, le tabou autour des menstruations et le manque de protections périodiques pour les femmes de certaines régions du monde, qui du coup se privent d'aller au travail ou à l'école trois ou quatre jours chaque mois. Plutôt que de breveter son tube de colle pour vagin, peut-être Daniel Dopps aurait-il plutôt dû se pencher sur la façon d'offrir aux femmes un moyen de ne plus avoir honte de cette période naturelle. Mais bon, il ne faut pas trop lui en demander.