Alors que depuis une semaine les violences provoquées par le film anti-islam « L'Innocence des musulmans » se multiplient dans le monde, et trois jours après une manifestation parisienne non-autorisée d’islamistes radicaux, Charlie Hebdo a publié mercredi de nouvelles caricatures de Mahomet. Et depuis l’annonce sur les réseaux sociaux mardi de cette publication, les réactions se font entendre entre défense de la liberté d’expression et accusation de provocation.
Ayrault appelle chacun à sa « responsabilité »
Le Premier ministre a réagi dès mardi soir affirmant sa « désapprobation face à tout excès » et appelant chacun à sa « responsabilité ». Et si Jean-Marc Ayrault a souligné que « la liberté d'expression constitue l'un des principes fondamentaux de notre République », il a aussi rappelé que « cette liberté s'exerce dans le cadre de la loi et sous le contrôle des tribunaux, dès lors qu'ils sont saisis ». Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, en visite au Caire, s’est lui dit « contre toute provocation », « surtout dans une période aussi sensible que celle-là », a-t-il ajouté.
Charb, le directeur de « Charlie Hebdo » s'est défendu de toute volonté de provocation : « Si on commence à se dire, parce qu'il y 250 excités qui manifestent devant l'ambassade des Etats-Unis, qu'il faut différer ou ne pas publier des dessins, ça veut dire que ce sont eux qui font la loi en France ». Pour Charb, les dessins publiés en page intérieure et en dernière page du journal ne sont pas plus provocants que d’habitude. « Je leur ai dit qu'il n'y avait rien en couverture, le soufflé est retombé et je pense que M. Fabius n'avait pas vu la Une quand il a parlé en Egypte ».
Le Grand recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a pour sa part appelé « à ne pas verser de l'huile sur le feu ». Il a aussi ajouté qu’il regrettait « que l'incitation à la haine religieuse ne soit pas réprimée par la loi comme l'est l'incitation à la haine raciale. ». Le président du Conseil français du culte musulman, Mohammed Moussaoui, a lui appris avec « une profonde consternation » la publication « de dessins insultants à l'égard du prophète de l'islam ».
Fillon défend Charlie Hebdo, Valls reçoit le Conseil français du culte musulman
Ce mercredi matin, les avis étaient plus partagés : Le Crif (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France) a désapprouvé considérant que ces dessins étaient « une forme de panache irresponsable ». La présidente du Front national (FN) a défendu la liberté d’expression : « Bien sûr c'est une provocation, mais en France, c'est autorisé », a-t-elle déclaré sur France 2. Sur Europe 1, le cardinal André Vingt-Trois a estimé que ces caricatures allaient « susciter la répulsion de beaucoup de croyants musulmans qui vont se sentir blessés dans leur foi et qui vont chercher des moyens d'exprimer leur mécontentement ».
François Fillon a pour sa part pris la défense de Charlie Hebdo sur le plateau de Canal + : « Ce qui est en train de se passer avec cette espèce d'intolérance qui monte dans une grande partie du monde et qui est instrumentalisée par des extrémistes (...), c'est une sorte de régression par rapport à l'état de la civilisation ». Enfin, les représentants du Conseil français du culte musulman (CFCM) ont annoncé mercredi qu'ils seraient reçus par le ministre de l'Intérieur Manuel Valls.
En France, des appels à protester samedi à Paris et dans plusieurs grandes villes de France ont circulé dès mardi sur Internet. Des manifestations que Jean-Marc Ayrault a aussitôt interdites. Par ailleurs, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a déclaré sur France Info que la France prenait des « précautions de sécurité particulières » pour protéger ses ambassades et que celles-ci, ainsi que les écoles françaises seront fermées vendredi, jour de la prière des musulmans, dans 20 pays.
VOIR AUSSI
Charlie Hebdo détruit par un incendie criminel cette nuit
Tunisie : 7 ans de prison pour avoir publié des caricatures de Mahomet sur Facebook
La liberté de la presse n’est pas un combat gagné