Ce sont des images qui font tourner de l'oeil. En pleine province de Shanxi - au nord de la Chine - et plus précisément dans la ville de Shuozhou, un homme a violemment battu (et tué) sa femme à coups de chaise. Cette scène relayée par Manya Koetse, rédactrice en cheffe du média d'actualités chinoises What's on Weibo, se déroule dans une rue passante. "Au moins 4 personnes se tiennent debout pendant que cet homme bat sa femme. Personne n'intervient pour arrêter ce 'conflit conjugal'", s'attriste la journaliste.
"C'est comme ça que ça commence, mais on sait comment ça se termine : la femme est tuée par son mari. Beaucoup de gens ont regardé cette scène mais personne n'a essayé d'arrêter l'agresseur", déplore la rédactrice. Largement relayée et commentée, cette vidéo virale choque l'opinion publique. La violence conjugale s'y affiche en pleine rue, aux yeux de toutes et tous. Finalité morbide : la victime a été retrouvée morte, baignant dans son sang, le 31 octobre dernier. Nous assistons donc à un féminicide.
"Le suspect est actuellement détenu par des organes de sécurité publique et cette affaire fait l'objet d'une enquête approfondie", a en retour déclaré un porte-parole de la police, comme le reporte le média britannique The Independent. Bien des voix perçoivent en cette actualité l'expression d'une violence trop banalisée dans le pays.
"Personne n'ose aider celles qui en ont besoin, car la loi ne les protège pas mais protège les individus puissants et malveillants". "C'est tout simplement terrible. Choquant. Répugnant". "Je me sens tellement mal à l'aise face à une telle scène. J'espère que cet agresseur ne sera pas libéré". Sous cette vidéo, les commentaires abondent. Et la mention de la loi nationale ne passe pas dans l'oreille d'un sourd.
Comme le rappelle à ce titre The Independent, cela fait seulement cinq ans que les violences conjugales sont punies en Chine. Une criminalisation très récente. Et ce n'est pas tout. Selon les autorités, 40 000 et 50 000 plaintes seraient déposées par des femmes chaque année dans le pays. Mais malgré ce recours aux autorités, une citoyenne chinoise sur quatre en moyenne aurait déjà été victime de violences conjugales comme le souligne l'ONG Amnesty International. La prévention de ces abus et le déploiement de services afin d'assurer la sécurité des victimes sont considérées comme trop insuffisantes. Et la pandémie mondiale n'arrange rien à cet état des lieux. En mars dernier, Le Monde déplorait une augmentation des violences en plein confinement.
Violences faites aux femmes, mais aussi aux enfants. Il y a cinq ans, le nombre de victimes constaté par les organisations non-gouvernementales était encore plus alarmant, nous apprend le média TV5 Monde : près d'une femme sur deux déclarait avoir déjà subi des violences physiques ou sexuelles. Violences et féminicides, assure le journal, demeurent "l'un des plus grands tabous en Chine". A en croire les images récemment diffusées, les choses n'ont pas changé : fermer les yeux est le premier des réflexes.
- Si vous êtes victime ou témoin de violences conjugales, appelez le 3919. Ce numéro d'écoute national est destiné aux femmes victimes de violences, à leur entourage et aux professionnels concernés. Cet appel est anonyme et gratuit.
- En cas de danger immédiat, appelez la police, la gendarmerie ou les pompiers en composant le 17 ou le 18.