Huit minutes insoutenables. On y entend deux enfants pleurer alors qu'ils viennent d'être séparés de leurs parents. L'une des fillettes, apparemment originaire du Salvador, demande entre deux sanglots à appeler sa tante. On entend un autre enfant appeler sans relâche son père. La vidéo a été publiée lundi 18 juin par le site américain Pro Publica pour illustrer la politique zéro immigration de l'administration Trump. Elle fait l'unanimité contre elle, de sa femme Melania Trump à l'ONU.
Entre le 19 avril et le 31 mai, ce sont presque 2 000 enfants qui ont dû subir cette séparation, dont plus d'une centaine ont moins de quatre ans. Les parents sont considérés comme des délinquants à peine la frontière franchie, avant même de pouvoir déposer une demande d'asile. Beaucoup fuient la violence dans leur pays. Pendant tout le temps de leur jugement, ils seront ainsi séparés de leurs enfants. Une simple feuille de papier est censé leur indiquer la procédure à suivre pour les retrouver. Mais comme l'explique Gayle King, une journaliste de CBS News, la plupart des parents n'ont aucune information.
Une autre journaliste, cette fois-ci de CNN, décrit les lieux où sont détenus les enfants : des sortes de cages pour animaux. Dianne Gallagher a pu prendre part à une visite organisée dans un des centres, à McAllen au Texas, dignes de celles que l'on pourrait voir en Corée du Nord. Aucun appareil de prise de son ou d'images n'était autorisé dans le centre. Des images ont été ensuite envoyées par les gardes frontières eux-mêmes. On y voit des enfants dans de larges cages, sur de fins matelas, parfois sous des couvertures de survie. La journaliste de CNN explique y avoir vu des enfants de moins de cinq ans.
Danoald Trump est attaqué de tous les bords, de son propre camp. D'anciennes First ladies se sont exprimées sur le sujet. Comme Laura Bush, femme de l'ancien président des Etats-Unis de de 2001 à 2009 George W. Bush), qui s'est exprimée dans une tribune du Washington Post le 17 juin : "Je vis dans un état frontalier [Le Texas] J'apprécie le besoin de renforcer et de protéger nos frontières internationales, mais cette politique de la tolérance zéro est cruelle. C'est immoral. Et cela me brise le coeur."
En citant cette phrase de Laura Bush sur Twitter, Michelle Obama a elle déclaré : "Parfois la vérité dépasse les clivages politiques". La propre femme de Donald Trump, Melania, s'est elle exprimée via sa porte-parole Stephanie Grisham. Elle dit "détester voir des enfants séparés de leur famille et espère que les deux camps du Congrès pourront enfin tomber d'accord pour faire aboutir une réforme réussie de l'immigration". Elle ajoute : "Elle pense que nous devons être un pays qui respecte toutes les lois mais aussi un pays qui gouverne avec coeur".
L'Académie Américaine de pédiatrie a alerté contre les "dommages irréparables" que cette pratique pouvait causer. L'ONU a déclaré cette politique de séparation des enfants "inadmissible". Le haut-commissaire des Nations Unies aux droits humains a dénoncé des pratiques "cruelles". Même le Pape François a tweeté sa désapprobation.
Via son canal de diffusion de prédilection, Twitter, Trump s'est répandu en justifications : "Les Démocrates forcent la séparation des familles à la frontière avec leur horrible et cruel agenda législatif. N'importe quelle Loi DOIT AVOIR un budget pour le Mur, la fin du attrapé et relâché, la loterie des visas et du rapprochement familial. Nous devons nous diriger vers une immigration basée sur le mérite. On y va ! GAGNER !". Le président américain essaie de mettre la pression aux démocrates pour obtenir une loi sur l'immigration en sa faveur au point mort depuis des mois et se sert de cette politique de tolérance zéro.
Depuis avril, les membres de son administration n'ont aucun scrupule à défendre une politique qui sépare les enfants de leurs parents. En première ligne pour défendre Donald Trump, on trouve sa secrétaire à la sécurité intérieure (ministre de l'Intérieur), Kirstjen Nielsen. Elle affirme dans un tweet daté du 17 juin : "Nous n'avons pas de politique de séparation des familles à la frontière. Point à la ligne." Lundi, elle a également déclaré : "Nous sommes un pays de compassion, nous sommes un pays qui a du coeur". Elle a aussi tenté d'expliquer que ces familles n'en étaient pas de vraies. Les journalistes du New York Times ont vérifié, moins de 1 % des enfants voyagent avec des adultes qui ne sont pas leurs parents et qui prétendent être des familles pour passer plus facilement.
Du côté des ultra-conservateurs, une chroniqueuse a accusé sur la chaîne Fox News les enfants de n'être dque es acteurs et a demandé au président Trump de ne pas se faire avoir par leurs faux pleurs.
Juste après la fusillade de Parkland, des partisan·e·s des armes avaient également accusé les survivants d'être des "acteurs de crises".