C'est un fait : dimanche 29 mars, l'ensemble des nouveaux conseils départementaux compteront autant d'élus que d'élues. La raison ? Leur élection par binôme hommes-femmes qui va faire passer le nombre de conseillères départementales (ex conseillères générales) de 560 (13,9% des élus) à 2 054. Une évolution du mode de scrutin, définie par la loi du 17 mai 2013 , saluée par Margaux Collet, membre du conseil d'administration du réseau Osez le féminisme.
"Depuis 1960, la parité a évolué de 0,3 point par an dans les conseils généraux. À ce rythme-là, une parité de fait aurait été atteinte en 2131 !", indique-t-elle. Et de poursuivre : "En termes de démocratie, c'est toujours un progrès si les élus sont davantage à l'image de la population qu'ils sont censés représenter", puisque, pour rappel, plus de la moitié (52,6%) des 43,2 millions d'électeurs français sont des électrices. Même satisfaction chez la sénatrice (UDI) de Paris Chantal Jouanno . "C'est bon pour la parité dans la mesure où ça oblige à ce qu'il y ait autant de femmes que d'hommes dans les conseils départementaux".
"Même si", nuance la présidente de la délégation aux Droits des femmes du Sénat, "sur le plan institutionnel, la mise en place de ces binômes posent un vrai problème politique en cas de divergences. Nous avons eu cette question à l'UDI où nous sommes pour le front républicain, alors que l'UMP (avec qui l'UDI présente des candidatures communes, ndlr) s'est prononcée contre. Et puis, ces binômes ne garantissent en rien l'exercice de postes à responsabilité par des femmes. La répartition hommes-femmes dans les présidences de départements sera, de ce point de vue, extrêmement intéressante à analyser".
Un "3e tour des départementales" primordial pour Margaux Collet . La répartition des postes au sein des exécutifs départementaux a donc valeur de test, afin de voir si ce changement de mode de scrutin aura, ou non, un réel impact. En effet, la loi du 17 mai 2013 ne prévoit, par exemple, aucun impératif de parité pour la présidence des conseils départementaux. Or, aujourd'hui, seuls 5 départements sur 101 sont présidés par des femmes. Une inégalité également prégnante dans les communes de plus de 1 000 habitants chargées d'appliquer les lois sur la parité, où si les conseils municipaux sont composés de 48,2% de femmes, elles ne sont que 16% à être maire.
"La parité est aujourd'hui impossible sans contraintes légales", analyse Chantal Jouanno. Des mesures dites de "discriminations positives" qui ne suffisent pas pour la sénatrice de Paris. "Malgré les systèmes de sanctions financières mis en place, les partis politique préfèrent encore s'acquitter des pénalités (Une retenue sur leur dotation publique qui représente plus de 3,5 millions d'euros par an pour l'UMP et 1,3 million par an au PS, ndlr) que d'appliquer la loi" en présentant, par exemple, autant de candidates que de candidats aux élections législatives.
Pour la présidente de la délégation aux Droits des femmes du Sénat, la solution est peut-être à trouver directement au sein des partis, dont les instances dirigeantes et les fédérations départementales, souvent ultra-masculines, ont la mainmise sur l'investiture des candidats. "Les sanctions à étudier ne doivent pas être forcément financières. Cela pourrait être l'interdiction de présenter des candidats à des élections, faute d'une commission d'investiture ou de fédérations paritaires", avance Chantal Jouanno.
"C'est aux partis de s'emparer réellement des questions d'égalité femmes-hommes", renchérit Margaux Collet d'Osez le féminisme, pour qui "au-delà même de la parité, les conseils départementaux, chargés de la petite-enfance, de l'aide sociale, de l'éducation à la sexualité dans les collèges... doivent mettre en place des politiques en faveur de l'égalité", faute de quoi la féminisation des exécutifs risque de demeurer purement comptable et cosmétique.